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choses ne peut pas faire l’impasse sur le retour dans le paysage éditorial, après plus de 15 ans d’absence, de l’éditeur français François-Dominique Jouis avec son ar- tiste vedette Jean-Charles Ablitzer. Harmonic Records, une étiquette légen- daire, est devenue aujourd’hui Harmonic Classics. L’objet disque est moins renver- sant que les plus incroyables parutions de jadis (Machaut, Couperin). Mais Ablitzer est au rendez-vous et la prise de son aussi, pour découvrir la musique d’orgue de Pablo Bruna (1611-1679) dans ce petit trésor pour hifistes et amateurs de raretés. Interprétation : *****
Son : *****
FRANÇOIS DEVIENNE
Concertopourflûteno 13.Symphonies concertantespourdeuxflûtesnos 3et6. Transcription du Concerto pour violon no 23deViotti.PatrickGallois(flûte), PerFlemstrom(2e flûte),
Orchestre de chambre de Suède. Naxos, 8.573 697
Si nous vous parlons rarement de disques pour flûte dans ces colonnes, c’est qu’ils sont en général épouvantablement enregistrés. C’est d’ailleurs la mésaventure qui est arrivée à un autre disque récent de Patrick Gallois, consacré au Concerto pour deux flûtes en ré de Mercadante enregistré à Prague dans une acoustique trop sèche et avec l’instrument placé trop en avant qui se met à chuin- ter et colorer. Tout au contraire, ce disque Devienne capté à Örebro en Suède par Sean Lewis ne cherche pas à nous vriller les tympans et préserve la bonne distance sans perdre de précision. Pour les amateurs de flûte, le motif de curiosité est ici la transcrip- tion du 23e Concerto pour violon de Giovanni Battista Viotti (1755 - 1823), compositeur resté fameux par l’enregistrement de son 22e Concerto par Arthur Grumiaux. La volu- bilité du 23e sied bien à la flûte. Ce n’est pas du répertoire essentiel, évidemment, mais, on l’a dit, les amateurs de flûte ont peu de bons disques à se mettre sous la dent. Interprétation : ****
Son : ****
JOSEPH HAYDN
Sonates pour piano, Volume 7 Jean Efflam Bavouzet Chandos, CHAN 10998
Pour ce volume 7 de son intégrale en cours des Sonates pour clavier de Haydn, Jean- Efflam Bavouzet a réuni les Sonates Hob. XVI: 5, 6, 31, 47 et 48. J’écris sonates pour clavier, puisqu’on peut les enregistrer au clavecin, au pianoforte ou au piano. Ronald Brautigam, chez Bis, a gravé la version de référence au pianoforte. Jean-Efflam Bavouzet est en train de constituer la référence au piano moderne, alors que Marc-André Hamelin s’est limité à une sélection de sonates (3 albums de 2 CD) chez Hyperion.
Ce qui est toujours aussi impressionnant chez Bavouzet, c’est l’adéquation entre les œuvres, le choix et le réglage du piano et la captation. Elle est ici assez sèche afin de res- treindre l’ampleur de l’instrument et de ne pas faire croire à une salle de concert, puisque ces sonates étaient destinées aux palais prin- ciers. Jeu d’une suprême élégance et projet artistique admirable.
Interprétation : ***** Son : *****
CLAUDIO MONTEVERDI
Les Vêpres de la Vierge Collegium Vocale Gent, Philippe Herreweghe Phi, 2 CD, LPH 029
Quoi? De nouvelles Vêpres de la Vierge par Philippe Herreweghe, lui qui avait enre- gistré une version en 1987 chez Harmonia Mundi ? Le chef voulait-il se refaire ? Car, en fait, sa version terne n’a jamais vrai- ment compté, notamment face aux deux monuments signés Savall et Gardiner. Aujourd’hui, alors que nos oreilles ont été amenées encore plus loin par le miraculeux
et presque profane Leonardo Garcia- Alarcon, Herreweghe persiste et signe avec une version que l’on jugera soit austère et concentrée, soit fade et plate. En tout cas, la jubilation monteverdienne passe à la trappe. Attention donc: ne vous fiez pas à l’affiche !
Interprétation : ** Son : ***
SERGEÏ RACHMANINOV
Études-Tableaux op. 33 et 39. Steven Osborne (piano). Hyperion, CDA, 68188
Après le titre de Disque du mois décerné, dans le dernier numéro, à Marc-André Hamelin pour sa Sonate D. 960 de Schubert, voici un nouveau chef-d’œuvre qui s’inscrit dans le catalogue pianistique de l’étiquette anglaise Hyperion. Aux côtés du pianiste québécois, Stephen Hough, Pavel Kolesnikov et Steven Osborne livrent, parution après parution, des disques fascinants. Steven Osborne avait déjà enregistré une version de référence des Préludes de Rachmaninov. Il nous arrive aujourd’hui avec les deux cycles d’Études-Tableaux, des partitions tout aussi intéressantes pour un vaste public. La tenue pianistique est admirable et Osborne ne dilue pas Rachmaninov dans le sentimen- talisme. C’est une musique noble, enregistrée avec une immense précision dans une acous- tique plutôt mate, mais pas sèche, qui mettra au défi votre chaîne Hifi.
Interprétation : ***** Son : *****
VIVALDI
Gloria en ré. Nisi Dominus.
Nulla in mundo pax sincera.
Julia Lejneva, Franco Fagioli, Chœur de la RTSI, I Barocchisti, Diego Fasolis. Decca, 483 3874
Cas fascinant, une distribution de vedettes absolues et, pourtant, un goût amer d’ina- chevé. Julia Lejneva (ou Lezhneva dans l’orthographe anglo-saxonne des noms russes), soprano phénoménale, véritable équilibriste vocale, est associée au nouveau contreténor vedette, Franco Fagioli, sous la direction de Diego Fasolis, accompagnateur chouchou de Cecilia Bartoli, qui compte à son actif de nombreux enregistrements de référence. Mais entre l’émission très en avant (dans le masque) de Fagioli et le timbre de
Lejneva, le mariage n’est pas idéal dans le Laudamus Te. Pour le reste, les chanteurs sont séparés sur le CD alors que le Nisi Dominus est dévolu à Fagioli et le Nulla in mundo à Lejneva. À tous les étages, même à la direction, tout apparaît assez stérile dans ce disque de musique sacrée. Il ne reste peut- être plus qu’à y croire...
Interprétation : ** Son : ****
THE GOLDEN AGE
Œuvres pour violon de Bruch, Kreisler, Debussy...
Ray Chen, Orchestre philharmonique de Londres, Robert Trevino.
Julien Quentin (piano).
Decca, 483 3852
Decca a piqué Ray Chen à Sony. Ici tout le monde s’en moque, mais les enjeux commer- ciaux sont réels, car le monde musical – qui a son Lang Lang au piano et son Yo-Yo Ma au violoncelle – manque cruellement d’un violoniste qui casserait la baraque sur le mar- ché asiatique! En attendant la vraie méga star, Ray Chen occupe correctement ce vide. Et nous avons de la chance, car il est excel- lent, a une vraie sonorité, très chaleureuse, et il n’est pas lesté par le goût parfois douteux de Lang Lang. Donc même un disque grand public tel que celui-ci a de la classe. Dans The Golden Age, Ray Chen rend hommage à deux légendes du violon, Fritz Kreisler et Jascha Heifetz, et il le fait avec classe. Un seul concerto, le 1er de Bruch, figure au menu. Il est joué avec un large vibrato charmeur. Voilà un disque pour tous, sans la moindre concession à la qualité artistique. Interprétation : ****
Son : ****
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