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Le front stabilisé en 1917
(Extrait de Max Schavion, Le front d’Orient, éd. Taillandier)
Les opérations commencent en mars 1915 avec la tentative de prendre le contrôle des détroits turcs, proposée par Winston Churchill, alors Lord de la Mer. L’échec coûteux de l’opération navale conduit les Alliés à engager à terre, à Gallipoli, des forces importantes, essentiellement britanniques. Celles-ci seront tenues en échec par les Turcs et nalement les Alliés devront évacuer leur tête de pont en janvier 1916, après avoir subi des pertes très importantes.
Mais dès septembre 1915, une autre expédition est mise sur pied par les Alliés dans le but d’empêcher l’écrasement de l’armée serbe, menacée par une attaque concentrique des Austro-Allemands et des Bulgares. La retraite rapide des forces serbes ne permet pas aux premiers renforts envoyés par les Alliés de leur porter secours mais ceux-ci, avec l’accord ambigu de la Grèce, sont dirigés sur Salonique. L’armée serbe épuisée doit se retirer en décembre 1915 sur l’Adriatique ; elle est alors recueillie par la otte alliée et réorganisée à Corfou au début 1916 pour un engagement ultérieur en Macédoine. Pendant ce temps, les Alliés renforcent progressivement Salonique, considérée comme base pour soutenir la Serbie et y rassemblent d’importants contingents, français, britanniques, serbes, italiens, russes et grecs. Cette concentration est facilitée par l’arrêt des offensives austro-bulgares qui après avoir envahi la Serbie, le Monténégro et l’Albanie, s’arrêtent aux frontières de la Grèce pour éviter de faire basculer ce pays au côté des Alliés. Ceux-ci organisent alors un front défensif s’étendant le long de cette frontière. Les renforts sont acheminés de France vers Salonique soit par voie maritime à partir de Toulon, soit, pour éviter les sous-marins autrichiens ou allemands, par un système mixte comportant la traversée de l’Italie par voie ferrée jusqu’à Tarente avec étape à Livourne, puis l’acheminement maritime de Tarente à Itéa dans
Cahier de Mémoire d’Ardèche et Temps Présent n°139, 2018
l’isthme de Corinthe, en n le transport par train d’Itéa à Salonique à travers la Grèce.
Début 1916, le général Sarrail qui a reçu le commandement des forces alliées à Salonique, dispose d’une force de quelque 150 000 hommes, certes peu homogène et de nationalités très diverses, mais suf sante pour organiser un dispositif solide à l’abri de l’ennemi, avant de pouvoir passer à l’offensive. Joffre souhaite que l’Armée d’Orient s’engage en Macédoine pour desserrer l’étreinte sur Verdun. Mais la constitution d’un front face aux Bulgares est dif cile en raison des distances, de l’extrême médiocrité des voies de communications, d’un terrain montagneux sans ressources et d’un climat rude. Le premier semestre 1916 n’apporte pas de résultats importants, d’autant plus que les Britanniques répugnent à renforcer leur contingent et à envisager une action offensive. Sarrail, qui, en dehors de ses amis politiques parisiens, est jugé par tous y compris par ses subordonnés alliés comme incompétent, ne quitte pas son bureau de Salonique, estime n’avoir pas les effectifs suf sants et ne fait rien pour améliorer l’ef cacité opérationnelle de ses troupes, minées par l’inaction.
A la mi-1916, une nouvelle offensive est prévue pour faciliter l’entrée en guerre de la Roumanie mais elle doit être repoussée, les préparatifs n’étant pas achevés. Quand il a lieu, cet engagement de l’armée roumaine est une catastrophe. Celle-ci est battue et le territoire roumain occupé ce qui n’améliore pas la situation de l’Armée d’Orient. Finalement, les années 1916 et 1917 peuvent être considérées comme des années perdues sur le théâtre d’Orient. Les tensions entre Alliés, l’attitude ambiguë de la Grèce, le manque d’effectifs et la complexité de la situation se conjuguent et font que malgré quelques opérations - attaques de portée limitée
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