Page 22 - Livre souvenir 2019

retrouver Allan, mon compère de comptoir, au fond du
rade dans lequel lui et moi avions déjà bien entamé la
soirée. On dissertait sur la vie, sur les dernières nouveautés
musicales et on riait en dépensant ma paie dans des verres
d’alcool fort. À la fermeture, j’emmenais Renée dans le
e
taudis que je louais à l’angle de la 8 rue. Nous y finissions
la nuit et je la ramenais à cinq heures, avant que son père
ne se lève.
Ça a fonctionné comme ça pendant plusieurs mois,
jusqu’au matin où, en rentrant, Renée a croisé son père qui
s’était levé plus tôt. Le soir même, elle s’est retrouvée à la
porte et elle est venue s’installer dans mon taudis. C’est à
partir de là que les difficultés ont commencé. Nous nous
sommes mariés à ses 18 ans, mais, sans projet d’avenir, les
choses ont progressivement viré au naufrage. Un beau
jour, j’ai fait ma valise et je suis parti pour Boston.
L’échec avec Renée est toujours resté dans ma vie
comme un éternel regret. Avec le recul et deux autres
mariages ratés, je suis convaincu que les choses auraient
pu fonctionner avec quelques années de plus. Nous étions
trop jeunes lorsque nous nous sommes rencontrés, mais on
ne réécrit pas l’histoire.
En plein soleil, Renée est à présent assise à la terrasse
du café et remue sa tasse avec un large sourire. Elle est
rayonnante.

Vincent

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