Page 8 - Voyages et groupe n°32
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 VG : De nombreux acteurs du tou- risme travaillent sur l’étranger, ils sont durement touchés, et on ne peut légitimement pas tenir le dis- cours : restez en France et n’allez pas voir ailleurs !
SL : Malheureusement, il y a des effets rebonds qui vont engendrer la fermeture de frontières. Le Covid-19 est en train de se développer dans le Sud, et quand le Nord sera guéri, il ne va pas s’ouvrir aux pays atteints. Une fois encore, il va falloir de la réassurance, dans tous les sens du terme. Pour le consommateur, l’assurance de pouvoir être remboursé en cas d’annulation ou de problème, l’assurance médicale, et avec elle de pouvoir être rapatrié. Il va falloir devenir une « maman » pour une destination touristique comme pour chacun des tour-opérateurs. Je pense qu’il y a quelque chose autour du maternel, lié au fait de rassurer, du care, (ndlr : ca- pacité à prendre soin d'autrui). Je crois que le tourisme de post-épidémie, sera le tourisme du care, faire attention à tout. Personne ne pouvait imaginer ce qui est arrivé et il est très difficile de savoir ce qui va se passer. Les gens sont traumatisés. Cela ne
veut pas dire ad vitam ae-
ternam, mais pour deux
ou trois ans. Et durant ces
deux ou trois prochaines
années, une sorte de nou-
velle normalité va se mettre en place. Pour ma part, je pense que les gens vont privilégier les voyages de proximité. Ilyaunepeurquel’onnepeutpas nier. Je l’entends dans ma famille, auprès de mes amis et connaissances. Les gens disent : « Je préfère rester en France, on a une bonne couverture so- ciale, on sait où est l’hôpital ». On en est là. Et après cela recommencera. J’in- siste sur le fait qu’on ne peut pas tirer des lignes sur un futur absolu, c’est
une période de convalescence pour le tourisme. Heureusement que les hu- mains sont résilients. C’est ce qui nous permettra de re-bouger. Les mots-clés sont coopération, convalescence et care : le futur du tourisme dans les deux ans qui viennent.
VG : Quels sont les changements qui peuvent s’opérer selon vous ? SL:Ilyatoutcequivachangerdans les mœurs. Prenez la distanciation so- ciale : va-t-elle être mise en place dans les avions ? Dans les autocars ? Comment les transports vont-ils se réinventer au
conscience de l’impact de l’humain sur les destinations. Je pense que ce Co- vid-19 ne fait que mettre en lumière et exacerber tout cela.
VG : Autre tendance qui pointait déjà, être déconnecté en vacances. Or, le confinement montre à quel point chacun multiplie les raisons d’être connectés. Après le déconfi- nement, reconnection ou déconnec- tion ?
SL : C’est difficile à prévoir, mais je pense que dans les années qui viennent, nous allons être très connectés les uns
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« Ce Covid-19 a quelque chose de positif, ilaarrêtéletemps,lacourseperpétuelle. En arrêtant de courir, on réfléchit. »
avec les autres. Ce qui est en train de se passer avec le confinement et qui risque de se produire dans le tourisme aussi, c’est que l’on redécouvre
temps de la distanciation sociale ? Ce sont des vraies questions. On parle également beaucoup de pollution. Cela fait déjà deux ou trois ans que le déve- loppement durable s’invite fortement dans le tourisme. La conscience de la planète se voyait déjà dans certains programmes, comme à Amsterdam par exemple, qui incitait les touristes à opter pour des tours en bateaux sur les canaux pour aller pêcher les plastiques. Les touristes commençaient déjà à prendre
la famille. Il va peut-être y avoir une ex- plosion des voyages en famille. D’un autre côté, il y a aussi tous les gens qui en ce moment sont obligés de vivre avec leur famille et qui vont peut-être aussi vouloir souffler loin d’elle. Les mamans d’enfants en bas âge notam- ment ! Les vacances en solo ou en couple et le retour des colonies de va- cances peuvent aussi avoir la cote. En sociologie, on parle de 30/30/30 : 30% des touristes ne recherchent rien de
 L’interview
















































































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