Page 58 - MOBILITES MAGAZINE N°9
P. 58
Politiques & institutions
INTERVIEW / Philippe Madec, architecte urbaniste t
A ne s’intéresser qu’à la mob
Mobilités
magazine
: vous êtes l’inventeur de l’expression et
du concept des « immobilités désirables ». Quel regard portez-vous sur les Assises nationales de la mobilité en cours cet automne ?
Philippe Madec : nous sommes très imprégnés, en France, de l’idée que l’on va résoudre les problèmes de déplacement quotidien par la mobilité maximale. Je dirais même absolue. Et que la vitesse, la puis- sance, l’automobile sont toujours synonymes de progrès, voire l’ex- pression même d’une modernité durable. Il me semble qu’il serait profitable à tous d’apprendre une certaine lenteur. Les assises de la mobilité pourraient être l’occasion de s’intéresser à l’immobilité. La mobilité ou une certaine immobilité ne sont pas des objets en soi, elles dépendent de l’organisation des territoires.
: en quoi cela pourrait-il conduite à de
nouvelles solutions ?
P. M. : cela mènerait à une autre conception de la ville. Celle héritée des modernes s’attache peu à la vie quotidienne des gens. Se dé- placer est un droit, une liberté, mais pour beaucoup c’est devenu une contrainte journalière. Nous passons des heures dans les em- bouteillages ou les transports pu- blics parce que l’aménagement du territoire ne résorbe pas les sé-
Si l’on veut améliorer les transports du quotidien, la priorité c’est de rapprocher tous les aspects de la vie banale...
grégations héritées de l’après- guerre : géographiques par activi- tés, habitation, travail, agriculture, étude, loisirs ; sociales, par l’argent, les groupes sociaux, les cultures. La ville où s’accumule le travail est peu généreuse avec ceux qui y travaillent. Il est si cher d’y habiter, que chaque jour elle épuise de si nombreux actifs qu’elle ren- voie tous les soirs chez eux. Cette ville-là produisait-elle des modes de vie désirables ? On voit bien que non.
: les villes des courtes distances, objectif que l’on voit fleurir un peu
partout, n’augurent-elles pas d’une conception plus vivable de la ville ?
P. M. : oui, comme la ville « mar- chable », que j’appelle aussi « la ville de la pantoufle ». Tout ce qui favorise les proximités est bon. Le
Mobilités
magazine
Alors que les Assises nationales de la mobilité entendent améliorer les transports du quotidien, Philippe Madec, architecte et urbaniste, suggère de ne pas chercher de solutions que du côté de la mobilité.
Mobilités
magazine
58 - MOBILITÉS MAGAZINE 09 -NOvEmbrE 2017