Page 9 - Mobilités Magazine Thématique N°8
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  Industrie Ferroviaire/Le contexte
Alstom-Siemens, des fiançailles rompues par l’Europe
 Ce devait être la naissance d’un « Airbus du rail » avec une locomotive franco-al-
lemande en tête. Au-delà de la formule-choc à destination de po- litique intérieure, ces noces ferro- viaires unissant Alstom et Siemens devaient bouleverser le paysage de l’industrie ferroviaire euro- péenne, même si elles faisaient toutefois question dans le monde politico-économique français(1) comme allemand. Le refus de la Commission européenne de la Concurrence a assez rapidement douché les espoirs qui avaient été entretenus alors.
L’affaire avait débuté officiellement le 26 septembre 2017, alors que le secret des négociations achevées dans un dernier sprint final et es- tival avait été soigneusement gardé. Entouré même de rumeurs insistantes qui évoquaient des dis- cussions (si elles ont eu lieu, elles étaient vraiment prémonitoires) entre Alstom et... Bombardier ! Pour les deux futurs partenaires pressentis, ce rapprochement de- vait avoir des conséquences ma- jeures sur l‘industrie ferroviaire eu- ropéenne. Parce qu’il aurait créé un groupe de taille mondiale qui aurait pu « peser » 15,3 Mds€ de chiffre d’affaires avec 1,2 Md€ de résultats (la somme brute et arith- métique des statistiques de 2016, ndlr.) et qui était alors riche de 61 Mds€ de commandes. Un groupe qui aurait totalisé 60 000 emplois, dont 9000 en France et 15 000 en Allemagne. Emplois ré- partis dans 19 sites européens des deux groupes (sur un total mondial de 39 sites).
Même si le projet d’accord de fu- sion prévoyait la préservation des sites et des emplois existants(1) du- rant quatre années, une réorgani- sation aurait touché sans doute au- tant leur géographie que leurs ac- tivités respectives. Si des « dou- blons » géographiques se situaient en Allemagne (2 sites Alstom et 6 sites Siemens), en Espagne (2 et 1), en France (9 et 2) et en Grande- Bretagne (3 et 2), la future répar- tition des activités réorganisées aurait dû sans doute autant être liée aux marchés locaux qu’aux points forts et aux faiblesses res- pectives des partenaires.
En tout état de cause, le projet a été refusé par la Direction Générale de la Concurrence européenne en février 2019. Mais dès l’été 2018 Margrethe Vestager, présidente de la même Direction, exprimait ses fortes réticences en estimant alors « que l’acquisition d’Alstom par Sie- mens (sic !) devrait amener à limiter
le choix des opérateurs ferroviaires européens (du côté de leurs) four- nisseurs et (des) produits inno- vants ». (Cette opération) devait aussi pousser à une certaine hausse des coûts de ces produits en raison d’une moindre concurrence sur le marché de l‘industrie ferroviaire ». Tandis qu’elle estimait par ailleurs « que la menace de nouveaux concurrents de taille mondiale, prin- cipalement celle du géant ferroviaire chinois CRRC qui, selon les deux partenaires, justifierait à elle seule la fusion, n’apparaissait pas vrai- ment comme crédible dans un futur proche »...
Ainsi, la Direction de la Concurrence
de la Commission européenne, arc- boutée sur son dogme apparem- ment intangible de « concurrence libre et non-faussée », aura tout
fait et de bout en bout pour contre- carrer le projet de fusion Alstom- Siemens. Quitte à nier une concur- rence extérieure qui ne s’embar- u
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