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Dossier : Agir en pro pour les pros
L'hypothèque légale des constructeurs, rénovateurs
et fournisseurs
Voici les recommandations de Marc Bergeron, avocat à l’APCHQ.
1. Pour le quincaillier, la première chose à vérifier est l’identité du propriétaire du bâtiment pour confirmer s’il s’agit
de l’entrepreneur ou de quelqu’un d’autre. Si l’entrepreneur est propriétaire du bâtiment sur lequel il effectue des travaux,
il n’y a pas d’action préalable à poser, car en cas de non- paiement, le quincaillier pourra, au plus tard 30 jours après la fin des travaux, publier une hypothèque légale de construction. Cependant, si le quincaillier n’a pas fait affaire directement avec le propriétaire du bâtiment, il pourra bénéficier
de l’hypothèque légale uniquement pour les travaux qui vont suivre une dénonciation de contrat écrite aux propriétaires.
2. Il n’est pas nécessaire d’attendre qu’il y ait un défaut
de paiement pour activer cette hypothèque légale. L’hypothèque légale, une notion bien particulière à notre droit québécois, existe par elle-même. Elle s’applique dès que des travaux sont effectués ou que des matériaux sont fournis.
3. Sur le terrain, les marchands constatent l’importance d’avoir un tel outil à leur disposition, comme l’explique Denis Warnett de Matério. « La plupart des gens sont consciencieux et ils payent bien. Cependant, il y a 3 ou 4 % de cette clientèle qui ne payent pas, ce qui nous oblige à utiliser les hypothèques légales pour être en mesure de saisir un ou plusieurs bâtiments. Récemment, nous avons dû exercer ce droit et cela nous a permis de recouvrir 80-90 % des sommes impliquées. »
de matériaux
L’hypothèque légale est un droit immobilier qui se définit comme un mécanisme de garantie
des créances des constructeurs et rénovateurs découlant des travaux qu’ils effectuent dans
un immeuble. Elle couvre la plus-value apportée au bâtiment par les matériaux ou les travaux
ou les services fournis.
L
es créances sont garanties par l’hypothèque, car celle-ci permet ultimement de faire vendre en justice l’immeuble sur lequel l’hypothèque est inscrite. Le prix de vente en justice
est alors affecté en tout ou en partie au paiement de la créance du constructeur, du rénovateur ou du fournisseur de matériaux.
Gouvernements
Souvent, l’entrepreneur est pris dans une situation où il doit payer le fournisseur de matériaux alors qu’il n’a pas été payé par le gouvernement ou une municipalité pour ses
travaux, explique Guillaume Houle, porte-parole de l’ACQ. Oui, il y a une loi qui encadre les contrats en général qui stipule que le paiement doit se faire dans les 30 jours, mais aucune pénalité n’est prévue. »
Aujourd’hui, il n’y a donc rien qui oblige le gouvernement et les muni- cipalités à payer dans des délais prescrits et souvent, lorsque les délais requis par la loi sur les contrats publics sont dépassés, les dossiers se retrouvent devant la justice.
« Cela embourbe le système et pendant ce temps, les entrepreneurs ne sont pas payés, les sous-traitants et les fournisseurs ne sont pas payés et c’est toute la chaîne de construction qui est affectée par le retard des paiements de la part des organismes publics.»
Nicolas Couture, président de Couture Timber Mart estime que «l’ACQ a 100 % raison, si le privé fonctionnait comme le public, on serait tous en faillite, ce n’est pas compliqué ! »
L’ACQ milite donc en faveur de l’adoption d’une loi qui obli- gerait le gouvernement à payer à l’intérieur de certains délais. Selon l’association, cet enjeu représente un milliard de dollars annuellement.
«Ce sont des sommes que le Québec perd à cause des délais de paiement dans l’industrie de la construction. Le gouvernement nous a promis il y a deux ans de s’attaquer à cette question, mais on attend encore le projet de règlement.»
et municipalités :
«
encore mauvais
payeurs ?
L’Association de la construction du Québec (ACQ) rappelle aux quincailliers et fournisseurs de matériaux que la question des délais de paiement risque de devenir un enjeu pour eux s’ils font affaire avec des entrepreneurs impliqués dans des projets financés par le gouvernement tels que des écoles ou des maisons pour ainés, ou encore des projets municipaux comme des bibliothèques.
Guillaume Houle est responsable des affaires publiques pour l’Association de la construction du Québec (ACQ).
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