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EN FRANCE
Après que la famille ait été séparée en 1917, les événements historiques qui ont suivi n’ont jamais permis que puisse se rétablir le moindre contact. Ce fut d’abord la réalité d’un mur, plus exactement un « rideau de fer »...
Un auteur russe disait en 1918 : «En cliquetant, en craquant et en grinçant, un rideau de fer descend sur l'histoire de la Russie. La représentation prend fin».
Un «rideau de fer» qui ne commencera à s’entrouvrir que le 1er janvier 1989 pour disparaître définitivement avec la chute du mur de Berlin le 9 novembre 1989.
Entre temps, un certain Nikita Sergueïevitch Khrouchtchev, ancien apparatchik proche de Staline mais qui avait su être le vainqueur de la lutte de pouvoir provoquée par la mort du «petit père des peuples» , ce même Nikita révèlera petit à petit à son pays les politiques répressives du stalinisme... après avoir lui-même ordonné des purges ukrainiennes ! En tout état de cause, ces petits pas furent bien le « début de la fin ».
Avant la guerre, le métèque, l’apatride Evel Kaïkhélévitch Iofa, (son seul passeport de la Russie Impériale est alors sans aucune valeur et il ne sera naturalisé français qu’en 1954 !) profession dessinateur, avait épousé le 11/03/1933 une ouvrière d’usine, Florentine, Mathilde Föllinger 25 ans, fille de Jacques et de Madeleine Sinn et petite-fille de Joseph, né à Sönau
Avec ma mère, peut-être en 1944...
(Allemagne) dans la forêt Noire.
Je suis leur fils unique.
Cette guerre mondiale, la famille française l’avait abordée par un exode dans la Nièvre où pour vivre Evel devint un temps bucheron, puis revenu à Colombes choisira de ne pas se déclarer juif au commissariat de police estimant sans doute par expérience que le port d’un signe distinctif ne pouvait qu’être de très mauvais augure. Travaillant dans l’usine d’aviation Amiot où des sabotages avaient eu lieu, il fut tout de même en 1943, pris dans un groupe d’otages et arrêté. Un des rares événements de cette époque dont j’ai gardé le souvenir ! Les miradors, les grands bérets noirs des miliciens, leurs hurlements, l’angoisse de ma mère...
Il est libéré après trois mois d’incarcération au fort de Romainville (centre de transit vers les camps)...! Quand on connait l’acharnement des autorités d’alors, c’était une chance incroyable qui ne pouvait être due qu’à l’inculture et la méconnaissance de l’onomastique juive de leurs agents car ses papiers d’identité portaient bien visiblement un de ces patronymes d’origine rabbinique qui ne laissait pourtant aucun doute sur le sort qui aurait du lui être réservé à moins que son passé militaire n’ait, aux yeux de certains, joué en sa faveur. Mais de nombreux déportés juifs disparus avaient pourtant eu aussi un respectable
1948 . Evel Kaïkhelevitch Iofa au au milieu du dernier rang.
passé militaire !
Le conflit terminé, il se réengage dans l’armée afin de faire les quelques mois qui lui manquent pour atteindre les années de service lui donnant droit à une retraite modeste, mais honorable. Séjours en Allemagne, puis de nouveau Maroc et Algérie. Il en sortira en 1948, chargé de médailles et d’une «Citation à l’ordre de l’armée».
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