Page 36 - Islenska
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veuse, espérant les voir revenir. Mais ils étaient bel et bien parties. Cette danse, ces baleines si merveilleuses étaient le signe que j’attendais. Pour elles, pour cette nature si extraordinaire, je devais être capable d’essuyer toutes les épreuves décrites dans le poème du scalde Tyr- fingur. Je retournai à la barre d’un pas décidé, rassérénée. Quand, maladroitement, je glissai sur un objet étrange et manquai de tomber. Sur le pont inondé, le soleil étincela sur un épais filament. Je m’approchais prudemment et, avec courage, pris l’objet inconnu en main. J’étudiais avec attention la forme. Elle était longue, fine, à la fois souple et solide. J’étais intriguée parce que certaine qu’il n’y avait rien sur ce bateau au moment de l’embarquement. Il se passait des choses si inattendues depuis mon arrivée que je crus naïvement que les baleines avaient dépo- sé cela pour moi. Après tout, certaines avaient sauté par-dessus le pont... Je tâtai l’objet de longs instants, réfléchissant à cette énigme. Puis un flash. Je mis la main dans ma poche pour y dénicher le parchemin. Y aurait-il un lien ? Je l’ouvris rapidement. Sous mes yeux, en temps réel, un vers s’estompait. Ce vers : « Le filtre de géant ».
L’objet dans une main, le parchemin du scalde dans l’autre, j’observais les runes disparaître. Et je fis enfin le rapprochement. Cet objet, le filtre, était un fanon d’une des baleines, ces géantes des mers. J’avais raison, il s’agissait bien d’un présent des baleines. Le vers s’effaçait pour manquer définitivement au poème. Sigurjón di- sait vrai. Ce vieux vélin recelait de magie. Pour chaque action menée, le poème raccourcissait.

































































































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