Page 3 - Participe présent : Numéro 76 - été 2019
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MOT DU RÉDACTEUR EN CHEF
















          SI ON VOUS DIT « LITTÉRATURE JEUNESSE », à quoi pensez-vous spontanément?
          Sans doute à des contes traditionnels pour enfants, comme ceux de Perreault par exemple. Peut-être aussi à des
          bandes dessinées, des albums jeunesse ou encore des livres courts, garnis de magnifiques illustrations, destinés
          à initier les enfants à la lecture. Ou encore, vous pensez à des romans d’aventures médiévales pour inspirer les
          jeunes garçons ou bien à des chroniques introspectives de la vie d’une jeune adolescente? Aussi hétéroclite que
          cet ensemble puisse paraître, il cerne assez fidèlement les multiples genres que peut englober la littérature
          jeunesse. Sauf que celle-ci ouvre sur bien d’autres considérations, tant d’ordre économique, stylistique, sociale,
          pédagogique que parentale.

          Pour les éditeurs franco-ontariens – bien qu’il soit impossible de   cibles de notre littérature (et peut-être encore plus lorsqu’on évo-
          vraiment comparer l’offre de chacun, certains ne publiant pas de   lue dans un contexte de minorité linguistique), il y a lieu de se
          titre pour le jeune public – la production de littérature jeunesse   questionner sur la voix qu’on donne à la diversité sous toutes ses
          oscille entre 18 % à 33 % pour trois d’entre les 6 interrogés dans   formes. Toutes ces considérations mériteraient une étude approfon-
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          notre sondage  maison. Un quatrième éditeur dit publier peu de   die et une réflexion qui pourrait – qui devrait même – se déployer
          littérature qui s’adresse spécifiquement aux enfants, mais vend une   sur  de  nombreuses  pages,  voire  occuper  des  volumes  entiers.  Il
          importante partie de sa production littéraire pour toutes catégories   va sans dire que les angles de réflexion que nous vous suggérons
          de public aux écoles, production accompagnée bien sûr de fiches   dans ce numéro ne pourront que dresser un portrait superficiel
          pédagogiques facilitant l’assimilation de ces œuvres par les élèves.   des questions soulevées, mais nous espérons qu’ils vous allumeront
          Ce secteur de vente varie de 15 % à 25 % des ventes de cette mai-  suffisamment pour entamer votre propre démarche, vous amener
          son d’édition selon les années. Deux autres maisons d’édition ne   à poursuivre la réflexion et éventuellement apporter des réponses.
          publient pas de titres pour la jeunesse, mais créent principalement   Faute de pouvoir aller au fond des choses dans un tel format,
          du matériel pédagogique destiné principalement aux écoles. Ici   donc, nous vous convions à un chassé-croisé de tons, de perspec-
          encore, le lien avec le secteur éducatif, et par extension les jeunes   tives et d’enjeux pour tracer les contours de la littérature jeunesse en
          qui le fréquentent, compte pour beaucoup dans la prospérité de ces   Ontario français. En un premier temps, le tandem Jean-Claude
          maisons. La quatrième maison d’édition, qui n’a pas de collection    Laroque et Denis Sauvé partagera sa réflexion sur le rôle des parents
          jeunesse à proprement parler, a tout de même publié à l’occasion.   comme passeurs du goût de la lecture. Du point de vue d’un auteur,
          Elle compte quatre titres destinés au public jeunesse, dont l’un a   Pierre-Luc Bélanger, nous éclairera sur le « grand écart » que les
          été un grand succès. Il est donc incontestable que d’un point de   auteurs jeunesse doivent effectuer pour combler le décalage
          vue d’affaires, la clientèle jeunesse et les écoles constituent une part   certain entre les sensations fortes qu’attendent les adolescents et
          non négligeable des recettes de nos éditeurs.
                                                                les contraintes qu’imposent les enseignants et les parents qui, bien
          D’un point de vue de créateur, la littérature jeunesse constitue un   souvent, achètent les livres pour les adolescents. C’est ensuite sur la
          prodigieux champ d’exploration et d’expression où les contraintes   place de la diversité dans notre littérature que se penchera Camylle
          de vocabulaire, de format et de contenu peuvent stimuler la créa-  Gauthier-Trépanier  dans  un  survol  concis,  mais  lucide,  de  la
          tivité. D’autre part, la littérature jeunesse est en quelque sorte un   situation. Pour finir sur une note légère en ce début d’été incertain,
          pont vers le lectorat de demain et – comme on l’a vu plus haut –   Mireille Tessier nous offrira sa recette gagnante pour un album
          un trait d’union entre les maisons d’édition et le système scolaire,    jeunesse. Vive la littérature… vive la littérature jeunesse.
          principal vecteur de diffusion auprès du jeune public. Et si la lit-  Richard J. Léger
          térature jeunesse est un monde en soi, avec ses propres codes, ses
          écueils particuliers et bien souvent une fonction éducative, elle
          compte aussi pour beaucoup dans le développement d’une iden-
          tité individuelle et culturelle. Comme pour tous les autres publics



          1  Les maisons sondées sont les Éditions David, L’Interligne, Prise de parole,
           le CFORP, le Gref et le Chardon bleu.


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