Page 4 - ALLO - L'INFORMATION SYNDICALE PRO DIRECT SERVICES SUD SOLIDAIRES CGT - NOVEMBRE DECEMBRE 2020
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ALLÔ Sud PTT Solidaires CGT lundi 23 novembre 2020

                   L'indemnité de télétravail résiste-t-elle au coronavirus ?


      La crise sanitaire à laquelle nous sommes confrontés et l’obliga�on de confinement qui en est résultée ont amené de
      nombreux salariés à basculer vers le télétravail.

      Il s’agit en fait de la première applica�on à grande échelle d’un texte de loi voté en 2012, à la suite de l’épidémie de
      grippe H1N1. L’ar�cle L1222-11 du code du travail dispose en effet :
      « En cas de circonstances excep�onnelles, notamment de menace d'épidémie, ou en cas de force majeure, la mise en
      œuvre du télétravail peut être considérée comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour perme�re
      la con�nuité de l'ac�vité de l'entreprise et garan�r la protec�on des salariés. »

      Ce texte déroge au principe général selon lequel le télétravail ne peut normalement être mis en place qu’avec l’accord du
      salarié. En présence d’un risque épidémique avéré, comme dans le cas du coronavirus, l’employeur peut donc imposer ce
      mode d’organisa�on du travail sans avoir besoin de recourir à un formalisme par�culier.


      La loi précise que le télétravailleur conserve les mêmes droits et avantages que ceux dont il bénéficierait dans les locaux
      de l’entreprise. Elle reste mue�e en revanche sur la contrainte que représente pour le salarié l’occupa�on d’une par�e
      de son domicile à des fins professionnelles, et qui cons�tue une forme d’immix�on dans sa vie privée.


      Dans le silence de la loi, la jurisprudence est venue consacrer le droit pour le salarié à une indemnité de télétravail. Ses
      condi�ons d'a�ribu�on sont définies en ces termes par la Cour de Cassa�on :
      « Le salarié peut prétendre à une indemnité au �tre de l'occupa�on de son domicile à des fins professionnelles dès lors
      qu'un local professionnel n'est pas mis effec�vement à sa disposi�on ».


      Le montant de ce�e indemnité est apprécié au cas par            cas en fonc�on du taux d’occupa�on du domicile
      en termes de temps et d’espace. Il pourra s’agir               notamment d’un prorata de la valeur loca�ve du
      logement du salarié, telle qu’elle figure sur son             avis d’imposi�on. Ainsi par exemple, le salarié qui
      habite une maison de 100 m2, et jus�fie avoir                affecté une pièce de 10 m2 à usage exclusif de
      bureau pour son télétravail, peut envisager de              solliciter une indemnité équivalente à 10% de la valeur
      loca�ve de son logement.

      Notons également que selon la jurisprudence, ce�e indemnité ne présente pas le caractère de salaire : elle se prescrit
      donc par cinq ans (contre trois pour les salaires), et n’est pas soumise à l’impôt sur le revenu.

      Qu’en est-il lorsque le télétravail résulte non pas d’un choix de l’employeur, mais d’une situa�on épidémique ? Les
      millions de salariés soumis à ce régime depuis le début de la crise sanitaire peuvent-ils prétendre, au-delà de leur salaire,
      au paiement d’une indemnité de télétravail ?


      Une récente communica�on du ministère du travail laisse entendre que l’employeur ne serait pas « tenu de verser à
      son salarié une indemnité de télétravail des�née à lui rembourser les frais découlant du télétravail ».
      Ce�e formula�on apparaît toutefois aussi maladroite que contestable.


      En premier lieu en effet, il ne s’agit pas ici uniquement d’une ques�on de remboursement de frais. L’indemnité de
      télétravail vise aussi à réparer le trouble occasionné par l’immix�on dans la vie privée du salarié que cons�tue
      l’occupa�on par�elle de son domicile. En ce sens, elle est totalement décorrélée de ses frais professionnels. En second
      lieu surtout, ce�e analyse repose sur le postulat erroné selon lequel l’indemnité ne serait due que lorsque le télétravail
      est mis en place à la demande de l’employeur. Si la jurisprudence était ini�alement orientée en ce sens, tel n’est plus le
      cas aujourd'hui. Depuis 2012 en effet, la Cour de Cassa�on a abandonné ce critère et pose désormais un principe général
      de droit à indemnisa�on du salarié dès lors qu’un local professionnel n’est pas mis à sa disposi�on, sans dis�nguer selon
      que le télétravail est mis en œuvre à l’ini�a�ve de l’employeur ou non. Il n’existe donc aucune raison objec�ve pour qu’il
      en soit différemment dans l’hypothèse où le télétravail est instauré en conséquence d’une situa�on épidémique.
      Il faut donc en déduire que tout salarié placé en télétravail dans le cadre de la crise sanitaire est en droit de solliciter de
      son employeur le versement d’une indemnité à ce �tre, en fonc�on des modalités par�culières d’occupa�on de son
      domicile. A l’heure où l’entreprise envisage de prolonger le télétravail au-delà de la stricte période de confinement, les
      organisa�ons syndicales comme l’employeur ont donc tout intérêt à se pencher au plus vite sur ce�e ques�on afin de
      prévenir d’éventuels conten�eux à venir.
                                              Édi�on spéciale Télétravail et Temps de travail

                      publiée par lessyndicatsSUD PTT SOLIDAIRES et CGT, des�née aux salarié.es PRO DIRECT SERVICES
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