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Ta maman tourangelle aux yeux verts t’a transmis, à toi l’unique mâle, le
                 sens artistique et le coup de crayon magique.

                 Parvenu  à  l’internat,  tu  as  bénévolement  enseigné  l’Anatomie  aux
                 étudiants  en  médecine  et  puis  aux  kinésithérapeutes  avec  un  principe
                 intangible : un dessin, une idée.
                 Le  parcours  hospitalier  s’est  assez  vite  compliqué  avec  es  patrons

                 boursouflés qui ne te méritaient pas.
                 Dès lors te voilà dispensé des courbettes et des allégeances interminables.

                 (Montherlant  écrivait :  l’homme  d’honneur  ne  se  courbe  que  pour
                 l’amour)
                 Nos  vrais  patrons  sont  ceux  que  nous  considérons  comme  nos  pères

                 spirituels.
                 Tu en as connu deux : Mr Merle D’Aubigné, sans doute assez vite bluffé
                 par tes dessins ; il t’a préfacé ton 3  livre d’anatomie. Raoul Tubiana fut le
                                                             e
                 second,  séduit  par  ta  faconde  et  ton  éloquence  fluide,  qualité  qu’il  ne
                 possédait pas lui-même, ses cours en anglais étant d’écoute plus évidente
                 qu’en français, sans doute par timidité excessive.


                 Ton chemin imprévisible devient réalité : chirurgien libéral, te voilà libre
                 de préférer l’honneur aux honneurs, de ne rien subir que tu ne le veuilles.

                 Tu  possédais  surtout  une  qualité  inaliénable :  l’EMPATHIE,  celle  d’un
                 être profondément convivial : quant  à choisir, tu as toujours préféré le
                 GEM,  plus  modeste  qu’aujourd’hui,  épaulé  par  des  secrétaires

                 immarcescibles  et  fidèles,  plutôt  que  la  SOFCOT,  vivier  d’égos  parfois
                 surdimensionnés, victimes de secrétaires impersonnelles.

                 Deux grands souvenirs émaillent cette période :
                 Pour  la  soirée  de  ta  Présidence  (1987)  j’avais  découvert  une  demeure
                 historique,  médiévale,  près  de  notre  Dame  de  Paris.  Nimbée  dans  la
                 musique  d’un  quatuor  Mozartien,  le  cocktail  eut  lieu  dans  une

                 atmosphère  de  roman  russe  fin  dix-neuvième,  agrémenté  d’une  assiette
                 caviar  rouge,  saumon  et  blinis,  résurgence  peut-être  de  ta  jeunesse

                 trotskiste. Tu étais simple, toujours, mais luxueux à la demande.
                 La  seconde,  était  celle  où  notre  ami  Rabischong  avait  métamorphosé
                 chaque invité en fonction de son « être profond »

                 Tu  étais  en  Cosaque  du  Don,  toi  qui  savais  déjà  que  « tant  qu’on  a  pas
                 tout donné, on n’a rien donné »








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