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REGARDS
Sophie Lacoste
   du terrain. Ainsi, les personnes qui sont censées être des experts dans le domaine de la psycho-oncologie n’ont pas d’expérience dans les traitements du cancer. Elles ne saisissent pas ce que représente doubler la sur- vie d’une personne atteinte d’un cancer du poumon ou de l’exploit d’une survie à dix ans pour un cancer du pancréas.
J’ai le privilège d’être oncologue médical, et l’un des très rares au monde à être ainsi capable de connaître à la fois le monde de la psycho-oncologie et de l’onco- logie médicale : je fais le pont entre ces deux mondes et au vu des études et de mon expérience de tous les jours, j’affirme que le simple fait d’accompagner les personnes touchées par le cancer améliore leur pro- nostic.
Aujourd’hui, l’enjeu n’est plus de démontrer si l’on peut améliorer la qualité de vie des personnes atteintes d’un cancer, notamment en situation métastatique, et leur offrir de meilleures chances de guérison ou de survie, mais de trouver comment diffuser cette infor- mation, et plus encore, comment rendre accessible en pratique cette approche, pour que le plus grand nombre puisse y avoir accès.
"Les progrès dans le traitement du cancer ne valent qu’à la hauteur de la capacité pour les patients d’y accéder." nous dit Monica M. Bertagnolli, Présidente ASCO 2019. C’était aussi l’avis du Dr Frieden, partagé dans un éditorial du prestigieux New England Journal of Medicine : "Il y a toujours un argument pour plus de recherches et de meilleures études, mais attendre plus d’études est souvent une décision implicite pour ne pas agir ou pour agir sur la base de la pratique anté- rieure plutôt que sur la base des meilleures preuves disponibles."2
Ainsi, notre étude3 montre qu’il est possible de pro- poser un soutien psychosocial structuré efficace aux personnes touchées par le cancer, même en situation métastatique.
Et elle confirme les résultats attendus, à savoir que la qualité de vie s’améliore alors que les patients vivent avec un cancer métastatique depuis plus de 2 ans et demi, avec une espérance de vie observée qui semble effectivement supérieure à celle attendue (57 % à 5 ans, contre 50 % à 2-3 ans attendus). Bien sûr, cela concerne des personnes "sélectionnées". Mais cette espérance de vie augmentée est cohérente avec l’analyse des études scientifiques publiées aupara- vant, faites avec des personnes "non sélectionnées",
et que le Pr David Spiegel4, notre Grand Témoin de ce jour (le Pr David Spiegel assistait au Congrès où Jean-Loup Mouysset a lu cette lettre, NDLR), a pré- sentée : + 29 % d’amélioration en moyenne sur la sur- vie lorsque l’on propose – en sus des soins anticancé- reux conventionnels – une intervention psychosociale structurée efficace pour améliorer la qualité de vie.
Nous sommes fiers de proposer une nouvelle ressource pour les personnes touchées par le cancer. Une res- source qui transforme l’approche des soins en redon- nant une place centrale à l’humain : pour les personnes malades, la possibilité de devenir maître d’œuvre de leur santé ; pour les soignants, la possibilité d’entrer en Alliance Thérapeutique avec les malades. Et pas de perte de chance : cela est proposé dans une démarche intégrative. Au contraire : un gain de chance ! Pas de promesse... mais nous proposons un traitement avec la certitude de donner les meilleures chances pour une meilleure qualité de vie et les meilleures chances de guérison.
Merci à tous ceux qui ont pris part à l’aventure hu- maine "Ressource",
Et merci à tous ceux qui rejoindront notre Cause ! »
Dr Jean-Loup Mouysset Oncologue médical
Président fondateur de la Fédération des Centres Ressource
Entrepreneur social Ashoka
Extrait de Devenir acteur de sa guérison de Jean-Loup Mouysset, éditions Mosaïque-Santé (en vente p. 26)
1 Hors approches uni thématiques type programme d’activité physique, gestion du stress ou programmes de retour à l’emploi (ne concernant hors exceptions que les personnes en rémission).
2 « There will always be an argument for more research and for better data, but waiting for more data is often an implicit decision not to act or to act on the basis of past practice rather than best available evidence ». Evidence for Health Decision Making – Beyond Randomized, Controlled Trials ; Frieden TR, N Engl J Med. 2017 ; 377(5):465-475.
3 « Structured Psychosocial Intervention for French Patients with Metastatic Cancer is possible in real life », acceptée pour publica- tion en juillet 2020 dans le Journal of Cancer Rehabilitation, par Mouysset JL, Spiegel D, Andersen B, Kinne E, Caillat P, Dewolf L, Zedet Saunders C, Rosati N, Bouillet T, Demonceaux A, Orts P, Blay JY.
4 Mirosevic S, Jo B, Kraemer HC, Ershadi M, Neri E, Spiegel D.
« Not just another meta-analysis » : sources of heterogeneity in psy- chosocial treatment effect on cancer survival. Cancer Med. 2019 ; 8(1):363-73.
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