Page 8 - Rebelle-santé n° 203 Extrait "Pédagogie Montessori"
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ÉDUCATION CUlTUre
que j’ai découvert la pédagogie Montessori, et j’ai eu le coup de foudre. C’était vraiment l’école où j’aurais aimé être. Après deux années de classes prépa, j’ai poursuivi mes études à la Sorbonne et, si j’ai hésité entre devenir prof d’histoire ou d’allemand, le choix d’être éducatrice Montessori s’est naturellement imposé. Je n’avais pas envie d’enseigner une matière plus qu’une autre. L’éducation m’intéresse plus que l’enseignement d’une discipline. J’ai fait ma formation assez jeune, en 2000. Depuis, je n’ai cessé de travailler en lien avec des environnements montessoriens, où j’ai toujours constaté l’épanouissement des enfants, à commencer par les miens.
Comment avez-vous eu le coup de foudre pour cette pédagogie ?
En lisant les livres de Maria Montessori. J’ai commen- cé par L’Enfant, son œuvre la plus connue où elle ex- plique les grands principes de sa pédagogie. C’est un ouvrage très percutant et facile d’accès. Puis, de fil en aiguille, j’ai dévoré toute sa bibliographie. Je me suis rendu compte qu’il manquait 11 chapitres à la version française de L’Enfant, et pour cause : cette traduction date de février 1936, alors que Maria Montessori a fini d’écrire son livre en août de la même année ! Entre autres, il manque des considérations très importantes sur les rapports de l’adulte à l’enfant, sur le conflit des générations, la différence de la perception du travail chez l’enfant et chez l’adulte, le droit des enfants, la mission des parents. Cette nouvelle traduction sort le 21 mars et c’est un événement car c’est la première édition française de ce livre phare dans sa version intégrale. Il expose une pensée toujours dans l’air du temps !
Dans le Que sais-je ? que vous avez écrit sur Maria Montessori et sa pédagogie, sorti l’an dernier, vous faites le portrait d’ « une femme résolument moderne », visionnaire, fervente catholique et un temps associée à Mussolini...
L’association entre Maria Montessori et Mussolini a toujours servi aux détracteurs de sa pédagogie. En réa- lité, je pense qu’elle a vraiment cru un temps qu’elle allait pouvoir étendre sa pédagogie grâce au soutien mussolinien, tandis qu’il espérait profiter de sa noto- riété internationale. Elle a néanmoins toujours gardé son indépendance intellectuelle et n’a jamais accepté d’être associée à lui. Quand elle a affirmé son indé- pendance, avec défi, Mussolini a fait fermer toutes ses écoles.
En revanche, la catholicité de Maria Montessori est indiscutable. Elle a grandi dans un pays et une famille catholiques et elle a même conçu une catéchèse. Elle a pu faire ses études de médecine, alors réservées aux hommes, grâce à une intervention du pape. Mais elle a toujours séparé la religion de sa pédagogie qu’elle voulait « scientifique » même si elle s’est inspirée de valeurs chrétiennes. Spirituelle, très ouverte à toutes les religions comme en Inde où elle a voyagé, Maria Montessori avait surtout foi dans l’humain. Elle défen- dait la reconnaissance des droits de la femme, de ceux de l’enfant et des personnes porteuses de handicap. Elle militait pour la reconnaissance de la différence et elle a inscrit son projet dans un programme huma- niste : forger des enfants respectueux d’eux-mêmes et des autres, de façon à ce que l’ensemble de la société soit de moins en moins hostile. Son objectif, c’est la paix et c’est pour cette raison qu’elle est restée apo- litique : elle ne voulait pas être instrumentalisée par
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