Page 51 - Rebelle-Santé n° 208
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Les objets exposés témoignent de l'évolution du regard occidental depuis les récits de voyages de Cook et Bougainville jusqu'à nos jours...
« Méfiez-vous des mots » : un mur à l’entrée répertorie tous les mots qui, à travers les siècles, ont désigné ces hommes d’ailleurs, des mots porteurs de stéréotypes et chargés d’histoire, de sauvage à esquimaux, de Bam- boula à moricaud. Des mots qui désignent, catégo- risent et stigmatisent. C’est par le langage qu’on donne à l’enfant les moyens de décrire le monde, en premier outil de représentation. Les fables et les histoires qu’on leur raconte forment un magasin idéologique, dans lequel chacun pioche des clichés constructeurs des visions futures.
Roger Boulay le commissaire de l'exposition, témoigne de l’évolution de ce regard : « Le propos de l’exposi- tion est de reconstituer la construction de cette ima- gerie ancienne qui se prolonge jusqu’à aujourd’hui. J’ai porté ainsi une attention particulière à l’impact de la diffusion de tous ces jouets, films, produits, livres en direction de l’enfance, en termes d’impact sur le public lui-même. L’impact n’est pas le même entre un très beau livre publié en 150 ou 200 exemplaires, tel le Macao et Cosmage d’Edy-Legrand, une robin- sonnade critique et magnifiquement illustrée parue dans La Nouvelle Revue française en 1919, et Tarzan, tiré en magazine à 250 000 exemplaires par semaine quelques années plus tard. Montrer à la fin de l’expo- sition la survivance des clichés est un choix délibéré. Il n’y a pas de happy end, on voit toujours réapparaître
ces stéréotypes de manière très facile. » Le racisme domine à travers les récits d’aventure et d’héroïsme qui l’emportent souvent en popularité sur les productions plus scientifiques, contribuant à figer les frontières entre monde sauvage et civilisé, perpé- tuant des schémas de peuples dominants et dominés.
Figurines esquimaux
ÉDUCATION
Rebelle-Santé N° 208 51
Paris, MAD / Michel Pintado. Tous droits réservés. © Musée du Quai Branly Jacques Chirac - photo Gautier Deblonde