Page 45 - L'AVENTURE DE JABER
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L’Aventure de Jaber
fouillent celui qui entre et celui qui sort comme si c’était le jour du Jugement. (Il parle lentement, baisse la voix, approche son visage de celui du vizir.) Et, malgré ça, nous allons nous moquer d’eux et nous ferons d’eux la risée de Bagdad pour des années et des siècles.
LE VIZIR, excité, il éternue. - Nous moquer d’eux! Que dis-tu là, mamelouk ? Si tu es en train de plaisanter, je ferai de ta peau un tambour et une darbouka. Allons !... Dis-moi comment veux-tu qu’on se moque d’eux. As-tu trouvé un bon arrangement ?
JABER. - Tout est prêt, Sire.
LE VIZIR, il est tellement excité qu’il prend une autre prise. - Dis vite ce que tu as dans le crâne... et si ce que tu dis est vrai...
JABER, avec un sourire malicieux. - Et si ce que je dis est vrai ?
LE VIZIR. - Je te comblerai de cadeaux.
JABER. - Je ne cherche qu’à satisfaire mon Maitre. Cependant, je me sens tout petit devant sa générosité.
LE VIZIR. - Ne marchande pas. Je t’offrirai ce que tu voudras.
JABER. - Gratifiera-t-il son humble serviteur d’un grade plus élevé ?
LE VIZIR. - Je te donnerai tout ce que tu veux si tu fais parvenir ma missive. JABER. - Et m’honorera-t-il en me donnant pour épouse Zoumourroude, la servante de ma dame Chams al-Nahar ?
LE VIZIR, impatient. - Elle est tienne... et avec, beaucoup d’argent. Mais révèle-nous avant tout ton stratagème.
JABER, il fait la révérence en s’approchant du vizir et, lentement, en appuyant sur les mots. - Sire, je vous offre ma tête.
LE VIZIR. - Tu m’offres ta tête ? Et que veux-tu que j’en fasse ? Encore une fois, je te préviens, mamelouk. Si tu es en train de plaisanter, je ferai de ta peau un tambour et une darbouka.
JABER. - Si ma tête n’était pas utile, je ne l’aurais pas offerte à mon Seigneur.
LE VIZIR. - Comment pourrait-elle m’être utile ?
JABER. - Sire, j’ai surveillé les gardes des heures entières. J’ai vu comment ils fouillaient et comment leurs doigts se faufilaient partout tels les serpents... Ils déchiraient les habits, lacéraient les chaussures, faisaient mal aux gens en leur plantant les ongles dans chaque partie du corps : le ventre, le dos, et quelquefois même entre les cuisses... mais personne n’a eu l’esprit de fouiller sous les cheveux de la tête.
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