Page 46 - L'AVENTURE DE JABER

L’Aventure de Jaber
LE VIZIR, d’un air niais. - Et que vont-ils trouver sous la chevelure à part les poux et les lentes ?
JABER. - Ils trouveront le message qu’ils cherchent, Maitre.
LE VIZIR, étonné, sa main qui cherche une prise de tabac s’immobilise. - Le message ! (Leurs regards pétillants se croisent un instant.) Tu veux dire... JABER. - Oui, Sire. (Il regarde autour de lui avec méfiance.) J’espère qu’il n’y a pas d’oreilles indiscrètes autour de nous.
LE VIZIR. - Qui ose s’approcher du diwan ?
JABER. - À vous donc de prendre les dispositions nécessaires. Nous appellerons le barbier pour me raser les cheveux. Quand la peau de la tête sera aussi lisse que la joue d’une belle jeune fille, notre Maitre, le vizir, y écrira son message. Nous attendrons ensuite que les cheveux repoussent et deviennent longs ; je sortirai alors tranquillement de Bagdad.
Le vizir halète, impressionné. Il met la prise de tabac dans son nez, mais il est tellement excité qu’il n’éternue pas. Son visage est tout chiffonné.
Chuchotements, murmures et commentaires se font entendre parmi les clients.
UN CLIENT. - Bravo !
CLIENT 2.- Où est-ce qu’il a trouvé cette astuce ?
CLIENT 3.- Que Dieu le protège ! Il est merveilleux. Quelle intelligence ! CLIENT 1.- C’est comme ça les vrais hommes ! Quelqu’un comme lui peut jongler avec tout un État.
CLIENT 3.- Il est bien de son temps. Je vous l’avais d’ailleurs dit, dès que je l’ai vu la première fois, qu’il était bien de son temps.
LE VIZIR, il essaie de surmonter son émotion. - Attends, attends... Nous te rasons d’abord la tête.
JABER. - Eh oui !
LE VIZIR. - Ensuite nous écrirons là-dessus le message.
JABER. - Eh oui !
LE VIZIR. - Nous attendrons que la tête soit recouverte de cheveux et que sous leur noirceur se dissimulent les mots.
JABER. - Eh oui !
Le vizir le fixe avec des yeux étonnés comme s’il était frappé de stupeur. Subitement, il éternue fort.
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