Page 51 - L'AVENTURE DE JABER
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L’Aventure de Jaber
LE VIZIR. - Ta tête vaut tout un royaume, Jaber !
JABER. - Elle est à vous. (Un instant jusqu’à ce que le barbier sorte.) Et maintenant... Sire ! Cherchez une plume et de l’encre indélébile.
LE VIZIR, ému. - C’est ce que nous allons faire sans tarder.
Le vizir va chercher sa plume et l’encrier pendant que Jaber porte, pour la première fois, la main à sa tête et la tâte. Il fait un long sourire plein d’intelligence.
Le vizir arrive avec l’encrier et la plume.
JABER. - Je suis entre vos mains, Sire.
Avec un mouvement lent, Jaber se met à genoux. Il a le visage tourné vers le public de façon à ce que toutes ses émotions soient visibles. Le vizir arrive avec une chaise basse, s’assoit derrière Jaber et pose l’encrier près de lui. Il caresse encore une fois la tête qui luit sous les lumières. Il trempe sa plume dans l’encrier et se met à écrire. Quand il pose la plume sur la tête de Jaber, les traits de celui-ci se contractent sous l’effet des piqûres mais il les supporte et ses yeux clignent.
JABER, son visage se contracte. - Ah ! Plaise à mon Seigneur de choisir les mots les plus tendres et les plus concis !
LE VIZIR. - N’aie pas peur ! J’abrégerai autant que possible.
De temps en temps, le vizir s’arrête un instant, réfléchit, cherchant un mot, puis se remet à écrire.
JABER, se contractant de douleur. - Je sens ce mot s’enfoncer dans mon crâne. Plaise à mon Seigneur d’en trouver un autre !
LE VIZIR. - J’ai presque terminé.
Il finit la phrase qu’il écrivait, pose la plume et ferme l’encrier. Mais il s’arrête subitement et se perd dans ses pensées.
JABER. - Maintenant qu’il a fini d’écrire sa missive, mon Seigneur me permet-il de me lever ?
LE VIZIR, pensif. - Non ... non ! Attends un peu. (Puis il se lève, arpente le diwan de long en large. Il prend une prise de tabac et éternue.)
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