Page 57 - L'AVENTURE DE JABER
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L’Aventure de Jaber
certains gouverneurs d’envoyer des renforts et, sans les renforts, il ne sera pas facile de le vaincre. Dis-moi, veux-tu que nous nous en lavions les mains et que nous laissions le vizir agir à sa guise à Bagdad, consolider ses forces et fortifier ses positions en attendant l’occasion favorable pour nous assaillir et nous exterminer ?
LE CALIFE, son visage est troublé. - Ne me provoque pas ! Tu sais bien que, cette fois-ci, je suis déterminé à ne pas reculer. Je ne supporte plus qu’il y ait à Bagdad deux califes et deux commandements. Je serais atteint de paralysie si je devais, après ça, le recevoir dans mon diwan et voir sa face hypocrite. ABDALLAH. - Alors, pourquoi hésitons-nous ? La ruse est le fondement du pouvoir. Nous ne changeons de tactique que pour une meilleure stratégie. À chaque situation, son discours. Nous tenons le fil. Nous lui avons coupé toute possibilité d’entrer en contact avec l’extérieur. Nous avons même convaincu des gouverneurs puissants de se joindre à nous. Nous avons maintenant des forces qui n’attendent qu’un signal et je crois que c’est le bon moment pour leur donner l’ordre de marcher sur Bagdad.
LE CALIFE. - Malgré cela, je veux que nos calculs soient précis. Notre situation ne peut souffrir ni erreur ni omission.
ABDALLAH. - Tu sais que je sais calculer. Je te confirme que l’occasion est venue de nous débarrasser d’eux et de rendre au pouvoir sa rigueur et son autorité.
LE CALIFE. - Tu sais ? Même indispensable, l’arrivée de ces gouverneurs cupides à la tête d’armées puissantes m’inquiète. Je crains que nous n’échappions à un malheur que pour tomber dans un autre. Si jamais la victoire réveille leur convoitise, ils nous le feront payer très cher. ABDALLAH. - Laisse-moi faire ! Quand nous en aurons fini avec le vizir et que nous aurons rendu aux forces armées de Bagdad leur unité, il nous sera facile d’affronter les imprévus. D’ailleurs, n’oublie pas que je connais les désaccords entre les gouverneurs eux-mêmes. Il est donc toujours aisé de susciter entre eux des luttes qui les saignent et les épuisent. Les concessions, elles-mêmes, peuvent être provisoires.
LE CALIFE. - Mais ce sont des traités, Abdallah !
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