Page 65 - La pratique spirituelle
P. 65

transparaît dans l’intelligence qui régit le mouvement des
 *          phénomènes. Le regard, initialement fixé sur les phénomènes,
 *  *
            se soulève alors pour s’orienter vers ce qui les transcende. La
 J’ai le sentiment que mon cœur est asséché. J’ai l’impression que   recherche perdure tant que le transcendant est objectivé, en
 je dois retrouver la foi car, sans elle, l’observation me paraît   un horizon inatteignable. Vient alors un passant qui pointe
 insuffisante. Sans la foi, pas de salut ?  son doigt vers le cœur de vous-même, en vous disant « tu es ce
 La foi est cette confiance absolue dans le pressentiment de   que tu cherches ». Cette phrase lapidaire détruit les résidus de
 la globalité, de cela qui est plein, sans que rien ne lui manque.   projection, et vous ramène à vous-même, dans votre essence
 C’est ce pressentiment qui vous guide et vous inspire. C’est   nue et incréée. Vous êtes, avant que ne naisse la pensée d’être.
 vers lui que doit se tourner l’attention, et non vers le monde,   C’est la confiance en ce pressentiment qui permet d’affermir le
 qui n’en est que son reflet. Cela n’empêche nullement d’ac-  pas, sur le sentier qui ramène au point de départ, permettant à
 complir les actions nécessaires. L’accent n’est plus mis sur la   la boucle de la pensée de se refermer dans ce dont elle est née.
 quantité, mais sur la qualité. Le corps et le mental sont soumis
 à l’intelligence. Ils n’œuvrent pas pour eux-mêmes, mais sont à   En résumé, la foi est liée à une intuition du Soi... jusqu’à ce que
 son service exclusif. La foi est alors intelligence en action, sen-  cette intuition nous ramène à la réalité du Soi, en nous-même.
 sibilité éveillée et pleine lucidité. Elle n’est pas une vague atti-  Oui, jusqu’à ce que le témoin se soit fondu dans le Soi lui-
 rance pour des mondes éthériques qui éloignent temporaire-  même, signant la fin de la division.
 ment les vicissitudes mondaines, mais une manière d’exprimer
 le divin, sans les entraves propres à la personnalité. C’est ainsi   Cela voudrait-il dire que le témoin soit encore une forme du
 qu’il y a présence, dans l’absence, et présence dans la présence.  « moi » ?
               Le Soi est l’unique témoin.
 *
 *  *       Comment pourriez-vous résumer la foi ?

 On s’abandonne à la méditation et on comprend que notre pen-  Le pressenti d’une intelligence qui transcende la forme.
 sée ne nous a conduit nulle part. Et ne croyant plus à cette pen-
 sée, il ne nous reste que « l’inconnu », en lequel nous nous aban-  Jésus parlait de la foi, en disant : « Je vous le dis en vérité, si
 donnons. Ce qui revient à dire que nous avons la foi de nous   vous aviez de la foi comme un grain de sénevé, vous diriez à
 laisser guider dans quelque chose que nous ne connaissons pas.   cette montagne : “Transporte-toi d’ici là”, et elle se transporte-
 Quel est votre point de vue à ce sujet ? C’est quoi la « foi » pour   rait. Rien ne vous serait impossible. » (Matthieu 17 : 20)
 vous ? Et l’éveil nécessite-t-il d’avoir la foi ? Si oui, la foi en quoi ?  La force dont il est question ici est celle de la conscience
 L’intuition du Soi est le guide et le maître. C’est elle qui   globale qui, lorsqu’elle prend possession du corps-mental,
 s’éveille en vous, lorsque vous pressentez une réalité qui trans-  anime les actes avec une justesse et une vigueur inconnues des
 cende le perçu, qui, bien qu’invisible aux yeux physiques,   actions égotiques.




 64                                   65
   60   61   62   63   64   65   66   67   68   69   70