Page 5 - LA MUSIQUE et la DANSE_Spread
P. 5

L’Air qui suit, (photo) remplit justement cette
                                                    fonction  avec  quelques  visées  esthétiques

                                                    particulières  car  il  s’agit  d’une  prière,  c’est  à
                                                    dire une demande qui par sa qualité génère la
                                                    probabilité de son propre accomplissement. La
                                                    musique accompagne et suggère à travers une

                                                    expression générale apollinienne la demande de
                                                    quiétude et de sérénité adressée à Dieu ainsi que
                                                    son accomplissement par la prière même.

                  J’ai utilisé quelques procédés d’écriture musicale assez simples, mais efficaces
               selon les témoignages de quelques interprètes et membres du public.
                  La pulsation correspond à un rythme cardiaque modéré permettant au public de

               se retrouver. Chaque battement est divisé par trois et organisé dans des mesures
               de 12 éléments, allusions cultuelles subtiles à la Trinité et aux apôtres. La facture
               de l’accompagnement rappelle la guitare et renforce l’idée d’une musique issue

               de  l’être,  suggérée  par  la  position  de  l’instrumentiste  faisant  corps  avec  son
               instrument.  Le  tempo  et  le  rythme  restent  constants,  ordonnés  et  rassurants
               enlevant la vigilance dédiée naturellement à l’adaptation au temps dégageant ainsi
               un plus de disponibilité et d’acuité psychique.

                  L’harmonie exprimée par les accords déliés, reste accrochée à la tonique, la
               note  sol,  dans  la  tonalité  mineure  évocatrice  de  mélancolie.  Les  quelques

               évènements harmoniques n’ont que peu d’incidence sur le discours, ils servent à
               renforcer quelques nuances dans le paysage sonore général.
                  La mélodie, située en hauteur, prend appui sur la tonique de la gamme et parfois
               sur la note ré, première harmonique différente de la fondamentale sol, gardant

               l’unité sonore, on peut dire de type pythagoricien, du discours. Un léger dialogue
               avec le piano, quelques notes, imitations et répliques à la main droite, assurent
               son avancement sans effort.   Située dans l’aigu mais dans une nuance faible :

               mezzo piano, la mélodie provoque un état paradoxal lors de sa perception, une
               sorte d’apnée prolongée qui nous pousse dans un espace invisible, indéchiffrable
               associé au sacré. D’habitude, l’aigu est synonyme de cri, donc d’un son court et

               puissant réveillant dans le corps le souvenir d’un accident, d’une brulure, d’une
               douleur  inattendue.  Le  stress  est  éliminé  immédiatement  à  travers  le  reflex
               inconditionnel  du  cri.  Entendre  une  mélopée  délicate  et  soutenue,  de  faible

               intensité à la place du cri, crée de l’incompréhension par rapport à la mémoire. Il
               se déclenche une recherche inconsciente d’un référentiel organique ou affectif qui
               introuvable, conforte la valeur mystérieuse, facilement associée au sacré, de ce
   1   2   3   4   5   6   7   8   9   10