Page 30 - Revue 6 Preuve_Neat
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qu’il faut aller chercher pour comprendre cette passion pour le dessin annuel
sur œuf.
Easter désigne – avec l’accent anglais – la déesse païenne anglo-saxonne Eostre,
déesse de l’est. Serais-tu surpris d’apprendre que les Chrétiens, doués d’un sens
commercial et marketing patent, empruntèrent un certain nombre de fêtes
païennes afin d’amener peu à peu les fidèles polythéistes à préférer un dieu
unique ? Dans ces récupérations festives, la symbolique profonde de la
célébration est conservée mais les personnages qui en sont les acteurs sont
remplacés. Le stratagème fut efficace mais ne facilita pas la tâche de l’historien.
La belle Eostre n’est pas propre au panthéon anglo-saxon et s’incarne dans la
déesse Ostara de la culture germanique, la ravissante Austra de la culture
baltique, Eos dans la culture grecque et Aurora chez les Romains. Toujours, la
déesse incarne l’aube, le renouveau du jour, elle est le soleil que l’on voit poindre
à l’horizon éveillant doucement la nature.
Ces figures féminines sont toutes issues d’une même divinité, Hausos, issue du
prototype religieux indo-européen. Ce dernier est aujourd’hui considéré par les
anthropologues comme la religion primordiale polythéiste supposément
partagée par les peuples proto-indo-européens (évidemment, je n’entre pas dans
le détail de cette idée complexe mais néanmoins passionnante). Et il se trouve
que nombre des mythes de notre culture européenne plongent leurs profondes
racines dans cette religion primordiale liée à la culture védique et hindouiste.
L’équivalent hindou et védique de Hausos se prénomme Uṣā « la Brillante ».
Elle initia la Création au matin du monde à l’occasion d’une relation incestueuse
avec son père Prajāpati. Les incestes n’étant pas rares dans les récits
mythologiques, je ne m’attarderai pas sur ce vice monstrueux pour en venir
directement à la signification symbolique de cet acte.
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