Page 71 - Annuel 2018
P. 71
Territoires, santé, bien-être
71 édition 2018
territoire, notamment à travers les retraites et la mobilité des retraités.
En matière de lutte contre la pauvreté, un sujet qui affecte 14% de la population en France – un peu moins à Lyon, un peu plus à Saint-Etienne –, le modèle français passe par un système qui est d’abord aveugle aux territoires. Les prestations de lutte contre la pauvreté (RSA, minimum vieillesse, mais égale- ment couverture maladie universelle complémentaire) sont à barème natio- nal. Seules les prestations logement ont un barème qui repose sur trois zones différentes. Cependant les spéci cités locales appellent de l’adaptation. Celle- ci passe par deux voies. D’abord l’action sociale des caisses et des collectivités territoriales. Les montants de ces actions et prestations sont très signi cativement inférieurs aux montants des dépenses passant par le vecteur national des prestations dites «légales» (pour ne pas dire nationales). Les prestations dites «extra-légales» (pour dire, globalement, locales) n’en représentent qu’une faible fraction. Elles sont cependant à la main des décideurs locaux. L’autre voie de l’adaptation de la protection sociale et, plus largement, de l’action publique, est la politique de la ville. Des Minguettes à Vaulx-en-Velin, mais aussi à la Villeneuve à Grenoble, la région a connu, histori- quement, des violences urbaines très médiatisées et a fait of ce de laboratoire
pour une politique de la ville cherchant, par exemple à la Duchère, à refondre à la fois la forme urbaine et la forme des politiques publiques.
La politique de la ville correspond à une évolution majeure de la pauvreté : elle s’est concentrée dans certains quartiers. Mais d’autres évolutions sont à souli- gner : rajeunissement de la population pauvre (car le système de retraite réduit considérablement la pauvreté âgée), « monoparentalisation » de la pauvreté (il y a désormais plus de pauvres vivant dans des familles monoparentales que dans des familles nombreuses), extension de la pauvreté laborieuse (les travailleurs pauvres). Ce sont ces différentes facettes que veut traiter une protection sociale qui à la fois s’univer- salise (tout le monde est couvert) et se cible de plus en plus sur les situations de dénuement, relatif ou absolu.
Un pan d’action important relève du logement. Les pouvoirs publics et les organismes de protection sociale agissent contre l’insalubrité (dont le constat peut obliger à reloger les ménages concernés) et l’indécence (dont le repérage peut amener à la consignation des prestations logement).
Alors que la lutte contre la pauvreté est historiquement locale (ce sont les paroisses qui, autrefois, agissaient),
elle s’est en quelque sorte nationalisée ces dernières décennies, avec un Etat qui veut toujours davantage agir en la matière. Parallèlement, les collectivités locales et l’action sociale locale des caisses de Sécurité sociale visent à une prise en charge adaptée des spéci cités de leurs territoires. Dans un certain brouillage des principes d’action et des responsabilités, avec des appels récurrents à la coordination et à la simpli cation, la notion de «chef de lât» est aujourd’hui mise en avant. En matière d’action sociale, les conseils départementaux seraient chefs de le.
En matière de Sécurité sociale, les partenaires sociaux ont perdu bien de l’in uence et des compétences par rapport à un Etat qui, légitimement, prend plus de place dans la gouvernance d’une protection sociale plus universelle. Plus largement, avec des réformes annoncées ou lancées tant pour ce qui a trait à la santé qu’à la pauvreté et aux retraites, la grande question du qui fait quoi apparaît toujours particulièrement alambiquée. Une manière de l’aborder consiste à repousser les vocabulaires ous à la mode et à se demander qui est le chef de façon à organiser des politiques ef caces. Il en va de la réalité des pouvoirs pour faire vivre ces villes inclusives et assurer le bien-être des populations et des territoires.