Page 28 - MOBILITES MAGAZINE N°29

Politiques & institutions
LE NIGHTJET DES ÖBB, OUTIL DE LA RECONQUÊTE DES NUITS FERROVIAIRES
Ce n’était pas un pari gagné d’avance. en octobre 2016, les ÖBB (Chemins de fer Fédéraux autrichiens) décident de reprendre environ la moitié des services de nuit (City Night line) que la Deutsche Bahn veut abandonner totalement en décembre 2017. ils rachètent à l’opérateur national allemand un parc de 42 voitures-lits et de 15 voitures-couchettes, auquelles s’ajoutait le propre parc ÖBB de nuit, composé de 52 voiture-lits (1 à 3 places), de 75 voitures-couchettes (4 ou 6 places) et 83 voitures places assises adaptées (compartiments de 6 places au lieu de 8).
« L’échec des Allemands est une opportunité pour les ÖBB », expliquait un an plus tard, fin 2017, Kurt Bauer, directeur grandes lignes des ÖBB, au quotidien allemand Die zeit pour expliquer son choix. stratégiquement conforté par la position géographique de l’autriche qui, quoique enclavée, en fait une véritable plaque tournante des flux du centre de l’europe, notamment au point de vue ferroviaire.
la première relation à être reprise mi-décembre 2016 à l’entrée en vigueur de l’horaire 2016-2018 était l’ancien Euronight Hambourg-Berlin-zurich dit eN 471(1) proposé avec une nouvelle offre qui associe lits, cou- chettes ou places assises, autrement dit une palette qui va du train hôtel avec cabine individuelle équipée de douche d’un WC(2) jusqu’au trajet low cost en place assise, les tarifs allant de 189 € petit-déjeuner inclus à moins de 40 €.
aujourd’hui, ÖBB exploite sous le label Nightjet, branche services nocturnes de l’offre nationale voyageurs grandes lignes Railjet, un vaste réseau de sept lignes- troncs(3) totalisant 25 relations allers-retours. Un réseau qui couvre, outre l’autriche et l’allemagne et grâce à des partenariats mis en œuvre avec les opérateurs nationaux, des services avec la Croatie, l’italie, la Hongrie, la Pologne, la République tchèque, la slovaquie, la slovénie et la suisse, un accord spécifique devant élargir la coopération avec les CFF qui ferait de zürich un hub essentiel du réseau Nighjet. tout un ensemble de relations qui sont, pour l’essentiel d’entre elles, situées à l’écart des réseaux à grande vitesse.
avec à peine plus de 4% du nombre des voyageurs grandes lignes, ces relations ont généré - dès l’exercice 2017-2018 - pas moins de 15 à 20% du chiffre d’affaires voyageurs des ÖBB, soit plus de 100 M€ par an, et sont d’ores et déjà (légèrement) bénéficiaires. et l’essai devrait être transformé en 2018-2019 avec 1,6 millions de voyageurs, soit une progression de 14%. Pas mal pour un marché souvent qualifié « de niche » !
le succès de cette réussite tient autant au choix des itinéraires qu’à l’organisation du travail des équipes de roulants, les deux étant très imbriqués puisqu’un itinéraire trop long obligerait à prévoir deux équipes de personnels roulants. elles sont toutes composées
de deux personnes. Un zugliner qui contrôle et vend les billets, effectue les tâches techniques au départ et lors des recompositions des trains (attelage, tests freins, etc.). Un housekeeper chargé des service clients (préparation ou réaménagement nuit/jour des com- partiments, petits-déjeuners, vente de boissons ...) Nouvelle étape en août 2018. la signature d’un contrat- cadre d’un montant de 1,5 Md€ avec siemens ouvre la voie au développement d’une nouvelle flotte de nuit, avec un premier volet de 375 M€ qui inclue la livraison de 13 rames dès 2021. l’occasion de proposer de nou- veaux aménagements notamment des lits placés lon- gitudinalement.
et les ÖBB regardent désormais avec intérêt les po- tentialités d’autres marchés comme celui du Danemark et des pays du Benelux. Voire la France si le marché s’ouvre réellement et dans des conditions claires et économiquement supportables...
MC
1) Grâce à cette reprise en main immédiate la relation n’a jamais été interrompue. Elle totalise 200 000 voyageurs par an soit près de 15% du trafic du réseau « Nightjet ».
2) Les Öbb ont acquis les 10 voitures - lits à deux niveaux avec leurs cabines de luxe qui entraient dans la composi- tion des trains de nuit Zurich-Vienne et berlin – Zurich.
3) Relations avec troncs communs puisque le système des « tranches » permet d’associer sur ces troncs com- muns et dans le même train des lots de voitures à desti- nations différentes. Voitures regroupées ou séparées du- rant les parcours dans les gares de correspondances. L’ensemble le plus complexe est la relation berlin – Vienne avec un itinéraire via le sud de la pologne et qui inclue des antennes de (et vers) bratislava, budapest, Cracovie et przemysl (frontière polono – ukrainienne). Un véritable condensé de la « mitteleuropa » !
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