Page 63 - MOBILITES MAGAZINE N°01
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                  ANALYSE/ Industrie ferroviaire t
        gnères-de-Bigorre a reçu le 22 dé- cembre dernier, la visite de Carole Delga, présidente de la nouvelle région Occitanie Pyrénées-Médi- terranée, qui a affirmé que « le site pyrénéen de CAF France est un étendard de l’excellence régio- nale et française » prouvant qu’il est possible « de développer une activité industrielle de pointe [...] en créant des emplois en zone ru- rale ». Excellence et proximité, maî- tres-mots de la politique de soutien de la région « pour booster la crois- sance et la compétitivité des en- treprises régionales ».
Giga-contrats : des
« pièges » pour l’industrie ferroviaire ?
Paradoxalement, Bagnères-de-Bi- gorre pour CAF et Crespin pour Bombardier témoignent d’une « délocalisation à l’envers » de l’in- dustrie ferroviaire, puisque ce sont des groupes étrangers qui ont choisi de profiter des opportunités existantes en France en matière de savoir-faire, d’équipements et de marché. Ce qui nous ramène à la politique industrielle. D’autant que « le gouvernement soutient fortement l’industrie automobile avec des primes à la casse, des subventions à l’achat de voitures dites propres [...] Des choix aux- quels s’ajoutent la relance des tra- vaux routiers et autoroutiers comme l’abandon de l’écotaxe poids lourds qui pénalisent le mode et l’industrie ferroviaire », estime Bruno Gazeau, le président de la Fédération nationale des As- sociations d’usagers des Trans- ports (Fnaut). Il dénonce parallè- lement une « politique industrielle [ferroviaire] défaillante » et pré- conise de « faire jouer la concur- rence afin de favoriser l’innovation et une baisse des coûts ». Notam- ment en lançant des « appels d’of- fres plus restreints et mieux ciblés, d’autant que les giga-contrats en-
gendrent finalement des pratiques anti-concurrentielles ». un point de vue partagé par Francis Nakache, pour qui «il n’y a pas que les contrats du siècle pour faire mar- cher l’industrie car le nombre ne fait pas baisser les prix à l’infini et ce système qui, en quelque sorte s’auto-alimente, alimente égale- ment les inquiétudes ». Durant le contrat [« va-t-on pouvoir suivre lacadence?»]etaufuretàme- sure que se rapproche son issue [« qu’y aura-t-il après ? »], point de rupture lourd et coûteux. Après tout, « il vaut mieux dix projets de 100 millions d’euros qu’un seul d’un milliard d’euros », conclut-il en es- timant que dans ce type de dé- marche la souplesse et l’innova- tion sont au rendez-vous.
L’ « épisode Belfort » a agi en effet d’électrochoc sur les décideurs po- litiques, donneurs d’ordres princi- paux du marché ferroviaire fran- çais. Il a eu aussi l‘intérêt de mettre
N Bruno Gazeau, pré sident
de la Fédération nationale des associations d’usagers des transports (Fnaut).
le doigt sur les manques d’une dé- marche qui mêle les enjeux indus- triels - y compris les conséquences de la mondialisation - ceux de l’aménagement ferroviaire du ter- ritoire aux mains de « l’Etat- stratège » et les marges de ma- nœuvre dévolues aux régions, désormais autorités organisatrices des transports ferroviaires de plein droit. Les hommes comme les lieux de production ne sont pas interchangeables à l’infini puisque les savoir-faire, les tissus indus- triels et les outils qui vont avec ne s’acquièrent et ne se créent pas ex-nihilo. Et même dans les pays les plus ouverts à la concurrence, le marché ferroviaire est en grande partie déterminé par le poids des commandes publiques : Etat, régions, autres collectivités territoriales. z
MICHEL CHLASTACZ
(1) Notamment la maintenance des BB 36 000 d’Akiem construites à Belfort. Ces activités sauve- garderaient 150 emplois. S’ajouteront la production de motrices TGV et de locomotives de travaux, la géographie du site et ses accès le vouant aux lo- comotives ...
(2) Le 23 septembre 2014 à Berlin, à l’issue de sa conférence de presse dans le cadre d’Innotrans, Henri Poupart-Lafarge, président d’Alstom Transport, constatait que, « seuls 20 % des activités ferroviaires du groupe étaient localisées en France. Même si notre pays restait la véritable vitrine de l’entre- prise ».
(3) Partie Ile-de-France du projet d’électrification Paris-Troyes.
  MoBiLités MAgAzinE 01 - FéVrIEr 2017 - 63
  Chaîne de montage du tram de St Etienne de CAF.
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