Page 20 - MOBILITES MAGAZINE N°23
P. 20

                 Technologies & innovations
  LE DIESEL EST-IL INCOMPATIBLE AVEC LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE ?
 Une fois encore, il faudrait clarifier les objectifs du législateur français. avec la loi de transition énergétique pour la croissance verte d'août 2015, sous une apparente neutralité, ce- lui-ci privilégie délibérément les énergies non-conventionnelles telles que gnV, l'éthanol eD95 ou électricité. Mais cela constitue-t-il la seule option pour sortir du pétrole ? Clairement non. D'ailleurs, le gnV est un produit d'origine fossile (seul le bio-gnV est renouvelable). or un moteur Diesel peut brûler d'autres carburants tels que les bio-gazoles (ester Méthy- liques d'acide gras), des gazoles de synthèse (btl, gtl) et les HVo (car- burants paraffiniques). Parmi ces carburants de substitution, les xtl, dérivés du procédé Fischer-tropsch, et les HVo sont pleinement compa- tibles avec les moteurs Diesel euro Vi, sans aucune modification des moteurs ou de leurs systèmes de dépollution. brigitte Martin, directrice adjointe du centre de résultats trans- ports de l'iFP-energies nouvelles de solaize, y voit un autre avantage du fait de la moindre présence de com- posés aromatiques poly-cycliques : « les biocarburants vont diminuer la charge de travail des systèmes de dépollution. Ils ont également des bénéfices environnementaux sur les véhicules anciens et optimisent les phases de démarrage à froid, le temps que les systèmes de dépol- lution soient pleinement opération- nels ». on peut donc s'affranchir to- talement de ressources pétrolières et réduire nos émissions polluantes et de Co2 ! en outre, le rendement des moteurs à allumage par com- pression, de 20% supérieur aux mo- teurs à allumage commandé fait que, toujours selon brigitte Martin, « le moteur Diesel reste le meilleur convertisseur d'énergie, avec le meil- leur rendement en terme d'émissions de CO2 et d'impact sur le climat. Un véhicule électrique, en ville, pour les émissions de polluants locaux, c'est parfait. Mais quid du cycle glo- bal si on intègre la production d'élec- tricité, le recyclage et les infrastruc- tures nécessaires ? ».
Hélas, ces carburants de substitution au gazole ne bénéficient pas de dé- fiscalisation, d'incitations ou de dé-
rogations dans le cadre de la loi de transition énergétique pour la crois- sance verte, pour la simple et terrible raison « qu'ils fonctionnent dans un moteur Diesel(1) »(sic) !
Cela est d'autant plus triste pour l'in- dustrie française que pour le HVo, on a quitté les laboratoires pour entrer en phase industrielle. la production d’HVo à raffinerie total de la Mède démarrera au 1er trimestre 2019. l’usine produira 500 000 tonnes par an d’HVo. la bioraffinerie a été conçue pour pou- voir traiter tout type d’huiles : des huiles végétales brutes (« certifiées durables » précise total) des graisses animales, des huiles alimentaires usa- gées et des huiles résiduelles (huiles issues de déchets et de l’industrie pa- petière). elle traitera 60 à 70% d’huiles végétales brutes (colza, tournesol, soja, palme, maïs, ou de nouvelles plantes du type carinata), avec un maximum de 450 000 tonnes d'intrants par an. total ajoute « Nous les utilise- rons en fonction des disponibilités sur le marché, des qualités requises et du prix, dans le respect de l’ensemble des règlementations en vigueur ». Pour faire taire la polémique née de la FDsea et des industries viticoles et sucrières françaises (intéressées plutôt par le développement des bio-étha- nols), total rassure : « l’approvision- nement en huile de palme brute à un volume inférieur à 50 % des volumes
Les bio- carburants de seconde génération peuvent utiliser toute forme de biomasse.
Ils n'entrent plus en concurrence avec les ressources alimentaires. Avec les carburants paraffiniques bio-HVO ou les combustibles de synthèse BTL, on peut s'affranchir du pétrole tout en étant compatible avec le parc circulant.
de matières premières qui seront trai- tées sur le site, soit maximum 300 000 tonnes par an ».
l'objectif étant de favoriser l’utilisation de « produits issus de l’économie cir- culaire », et notamment le recyclage de graisses animales, qui pourront re- présenter au moins 100 000 tonnes par an - un volume plus élevé que ce qui était envisagé à l’origine du projet. la Mède traitera 30 à 40% de graisses animales, d’huiles alimentaires usagées et d’huiles résiduelles (huiles issues de déchets et de l’industrie papetière). l'avenir, c'est le bio-HVo exploitant toute forme de biomasse. Cet ambitieux programme, appelé biotfuel sur le site total de la Raffinerie des Flandres, est en phase de démarrage ce début d'année 2019. outre le pétrolier total, il implique avril, axens, le Cea, l'iFP- energies nouvelles et thyssenKrupp. Voir seulement en l'électricité une so- lution défendant l'indépendance éner- gétique et stratégique française est un leurre comme le démontre une étude conjointe de l'aDeMe et de l'iFP- energies nouvelles(2). Mais bercy et Matignon ont leurs raisons que la raison ignore...
20 - Mobilités Magazine 23 -FévRIER 2019
1) voir l’interview Laurent Michel Directeur de la DGEC au Ministère du développement durable le 8 septembre 2017 sur le site www.mobilitesmagazine.com.
2) https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/ documents/electrification-parc-automobile-criticite-lithium- horizon-2050_2018.pdf
 





















































































   18   19   20   21   22