Page 34 - MOBILITES MAGAZINE N°14
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                             Politiques & institutions
   de créer de durs conflits avec les syndicats de cheminots mais aussi avec les élus locaux et régionaux. Serait-ce un pari dont l’issue é - espérée favorable au gouverne- ment - permettrait de repartir sur de nouvelles bases ?
Pour le rapporteur, l’ouverture à la concurrence ne doit pas concerner seulement les TER mais aussi les relations grandes lignes intérieures, y compris celles assurées par des trains à grande vitesse. il préconise aussi un changement de statut pour l’actuel EPiC (Etablissement Public industriel et Commercial) SNCF avec le passage en société anonyme de SNCF Mobilités. Mais aussi et plus curieusement pour SNCF Réseau qui, au passage, in- tègrerait Gares & Connexions dans son giron. il s’agirait, en supprimant la garantie financière automatique de l’Etat liée au statut existant, de bloquer la spirale de l’endettement. Serait-ce aussi pour permettre, dans l’avenir d’autres ouvertures du capital des nouvelles sociétés anonymes(3) ?
Pas de surprise à l’ouverture
Côté ouverture du système à la concurrence, le rapport reste to- talement dans les clous en préco- nisant le choix entre les deux formes différentes et connues d’ap- proche, en fonction des services régionaux et nationaux.
D’une part, un système type dé- légation de service public (DSP) fortement encadrée par les AOT. Démarche située dans une logique d’ouverture progressive sur la base d’appels d’offres et au mieux disant pour les lignes TER. Ce qui implique, comme nous l’avons vu, des trans- ferts de personnels(4).
D’autre part, pour les relations grandes lignes et les services TGv, le rapporteur indique sa préférence pour une forme d’open access aux risques et périls des opérateurs éventuels. Cette double option est
Beaucoup de petites lignes ont été supprimées au détriment du maillage du réseau, donc des transports
du quotidien, sans pour autant rétablir la santé financière du rail.
    partagée par la Fédération natio- nale des associations d’Usagers des Transports (voir encadré). Tou- tefois, la Fnaut n’apprécie guère - et c’est un euphémisme - la plupart des autres mesures préconisées, principalement les propositions de contraction du réseau. En vertu du fait que le tiers du kilométrage du réseau ne totaliserait que 2% des trafics et que cette situation coûte 1,7 milliard d’euros par an au système ferroviaire.
Aussi, quelles que soient les futures conditions d’ouverture à la concur- rence, le traitement réservé aux petites lignes (sic !), autrement dit aux lignes régionales dans le rap- port de Jean-Cyril Spinetta, a de quoi préoccuper très fortement les usagers et les régions. Au-delà du retour récurrent - et significatif ? - d’un vocabulaire daté des années 70, ce n’est ni plus ni moins que le maintien de près du tiers du kilo- métrage du réseau qui est ici mis en jeu. Quand le rapporteur estime qu’il faut « recentrer le transport ferroviaire sur son domaine de pertinence : les transports du quo- tidien en zone urbaine et périur- baine et les dessertes à grande vitesse(5) entre les principales mé- tropoles françaises ».
On a ici l’impression de se trouver quatre décennies en arrière face à une forme réactualisée du Plan Guillaumat, bien oublié pourtant depuis en raison de la régionali- sation et la création des TER. En
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1978, alors que près de 10 000 km de lignes avaient déjà été fermées au trafic ferroviaire des voyageurs en moins de dix ans, ce plan pré- conisait de limiter le transport fer- roviaire à un simple « réseau noyau » de grandes lignes clas- siques structurantes, le projet de la grande vitesse n’étant à ce mo- ment qu’à peine amorcé avec le début du chantier de Paris-Lyon. Plan proposé, en dépit de l’impact des deux premières crises pétro- lières qui avaient montré l’intérêt de transports moins dépendants d’une forte consommation d’hy- drocarbures.
L’écologie sacrifiée ?
Aujourd’hui, la démarche du rapport Spinetta qui prône une semblable rétractation du réseau ferré se trouve tout aussi à rebours d’im- pératifs écologiques officiellement proclamés. voire claironnés, par un ministre ad-hoc très médiatisé. Dans ce rapport qui abandonne totalement toute volonté, voire toute idée de transfert modal de la route vers le rail, l’argumentation environnementale ne sert qu’à jus- tifier les suppressions de lignes par des comparaisons techniques hasardeuses entre autorail et au- tocar. Suppressions qui finalement ne profiteraient qu’au développe- ment de l’utilisation de la « voiture en solo »(6). Circonstance aggra- vante, la mesure pourrait - au nom des niveaux de trafic, voire de
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