Page 12 - Madame K. (Nouvelle SCI)
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L’Extraordinaire Épopée de Mme K.
maintenant trop tard pour vous, et à l’instant même, il y en a qui se love dans votre tignasse jaune affreuse, il y en a qui se couche sur vos lèvres couleur zéro putain, et d’autres qui se reposent – pour un instant seulement – sur vos cils utilisés en la circonstance en hamacs de fortune, bientôt embourbés jusqu’au cou dans vos peintures de guerre, dans votre beauté boueuse. Pour vous, ils ont disparu, mais à la vérité, ils sont toujours là, c’est-à-dire en vous, ma- très-chère-petite-dame, dans le creux de vos interstices les plus secrets, les plus pudiques. Et le plus cynique dans cette histoire, c’est qu’il vous est totalement impossible de les vomir de votre bouche. Eux et leurs souvenirs continueront toujours à parler en vous. Ils deviendront votre dieu intérieur ou, plus exactement, votre nouveau démon intérieur, et, petit à petit, ils prendront votre place. Et bientôt, vous ne serez plus. Voilà ce que je dis, moi : Good morning, Satan ! Voyez-vous, ma toute petite dame, vous n’êtes pas la seule à aimer les jeux de mots. Mais, comme on dit, jeu de mots, jeu de maux, pluriel désormais déposé et breveté de mâle. C’est comme ça, il faut bien que le monde évolue quelque part, c’est vous-même qui l’avez dit, ou plutôt supposé, c’est pareil, je n’invente rien, et c’est ça votre drame. Les mots ! Les mots ! Les mots ! Qu’est-ce qu’ils valent maintenant ? Vous voilà bien seule, sans vos bouées de vocabulaire. Les mots ne sont que des mirages, et ils ne vous seront désormais plus d’aucun secours. Décidément, pas de pot, ma petite dame. »
Mme K., à ces dernières paroles, se lève d’un bond. Elle entame un drôle de tango mécanique dansé seule avec la Mort. Elle se gratte furieusement les bras, les jambes, le ventre, le sexe. Elle hurle à la shampouineuse de l’aider, elle veut qu’on lui laboure