Page 75 - Le grimoire de Catherine
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Le voilà d’un bond auprès de nous. Il est disposé aujourd’hui à nous faire ses
confidences. Il est en effet un peu triste car il s’est approché de l’école des enfants et
a découvert que la vie n’était pas rose pour tous ses congénères. Au beau milieu de
la classe, il a aperçu une cage, une petite prison grillagée.
A l’intérieur, deux de ses congénères se morfondent. Ils y font des galipettes et
entendent des dictées qui obligent les enfants à écrire le mot qu’ils
redoutent« ECUREUIL ». Ils se sentent ainsi responsables de la faute d’orthographe
qui ne va pas rater. Triste vie de reclus !
Nous compatissons. Le soleil qui a pour habitude de se lever de ce côté, frappe de son
éclat l’œil de mon volatile ami, qui, ainsi stimulé, ressent une envie d’agir.
Lui - même attaché au toit du moulin ne peut rien faire et l’écureuil a bien trop peur
d’être pris à son tour au piège. Aussi au nom de la solidarité « plumes – poils » me
voilà chargé de l’opération sauvetage. Je ne peux refuser bien que transformé en
forteresse tremblante.
Du haut de la girouette, ailes déployées, en forme de V, je plonge, j’entre par la fenêtre
de cette classe qui sent le crayon, les baskets, les bonbons à la fraise. Les détenus ont
un regard rempli d’espoir .Je tire le loquet de mon bec. Opération réussie et
terminée.Je suis fier de moi car je suis capable de ne plus avoir peur face à ce que je
ne connais pas.
Le vent continue à jouer avec mon ami ! Vent debout ! Nous voilà face au Nord !
« -Cela tombe bien, je vais pouvoir te montrer ce qui m’attriste. Regarde bien ce
paysage, profite des couleurs, enivres toi des senteurs de thym, de laurier. Ecoute le
murmure des abeilles au travail. Suis le grand canal ombragé de platanes centenaires
qui finira bien par rencontrer la mer. Tu vas voir ce dont sont capables les hommes. ».
Le soleil est maintenant à son zénith. Un bruit sourd commence à se faire
entendre .Il gronde, s’amplifie, régulier tel une nuée d’insectes nuisibles. Un
hélicoptère ! Nous pouvons distinguer sa carlingue menaçante qui passe au dessus de
nos têtes, près, très près, c’est un coup à me déplumer. Ouf, il nous a évités .
Mais que fait-il ? Il lance des gerbes d’eau. Non ce n’est pas cela. Il laisse derrière lui
un drôle de nuage de couleur violine. Tout est saupoudrer, la nature fait le dos rond
sous cette agression.
La pluie de pesticides a commencé son travail. Les fleurs de tournesol se
recroquevillent sur leurs tiges, le thym retient son souffle. L es abeilles s’affolent, leur
reine est en danger ! La colombe qui buvait quelques gouttes du fleuve se sent
maintenant nauséeuse. Ce dernier, habituellement si limpide, a changé de couleur et
traine un long voile opaque tel un ruban de nuages sombres.
Comment faire cesser cette attaque? Comment être utile ? Le coq n’a plus
d’espoir .IL attend pour essayer de remédier à cette situation, depuis longtemps, la
visite de la colombe réputée pour être porteuse de messages de paix, mais elle ne
vient pas, trop malade.
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