Page 77 - Le grimoire de Catherine
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« -Tu as été bien  curieux, dans cet arbre  tu as fais connaissance avec  tous les états
              d’âme que traversent les êtres vivants  durant leur existence  mais tu as été trop loin.
              Tu as franchi le domaine de Monsieur Rossini qui a écrit « Le duo des chats» !
              Ces voyages t’ont fait grandir .Tu  es devenu ce que tu  voulais être, un  oiseau libre
              mais  n’oublie  pas    que  la  liberté    fait  toujours  peur  à  ceux  qui  n’osent  pas.  Reste
              toujours sur tes gardes et vole vers les autres. A ce sujet  je dois te demander  quelque
              chose. Serai-tu  prêt à m’aider  à ton tour ? »

              Je vous laisse imaginer  mon étonnement, le roi de la girouette qui me demande  un
              coup de patte ! De quoi peut-il avoir  besoin, lui qui côtoie  le vent  et les  nuages, qui
              semble observer la vie avec  une certaine hauteur. Peut-être  a-t-il comme conseiller
              occulte  quelque  dieu  de  l’Olympe !  Je  lui  dois  bien  cela  après  l’aventure  qu’il  m’a
              permis de vivre. Je l’écoute :

              « -Je  m’ennuie !  Je    suis    là,  fixé  depuis    si  longtemps  sur  ce  moulin  .Mon  seul
              compagnon  de  jeu  est  le  vent  qui  ne  vient    que  lorsqu’il  en  a  le  temps.  Je  n’espère
              qu’une  chose,  voyager,  loin,  bien  loin,  je  sais  où  aller  pour  réaliser    mon  rêve.  Je
              voudrai  me  rendre  à  Venise    afin  d’y  rencontrer  le  phénix,  cet  oiseau  légendaire  qui
              renaît de ses cendres et qui se laisse admirer sur le  fronton  de l’opéra magique.»
              Je  me  doutais bien qu’il avait des fréquentations hors  normes. Décidément  il me plaÎt
              ce  coq !  Quel  joli    projet,  je  vais  l’aider.  Ses  pattes  sont   bien    fixées  par  d’énormes
              clous    rouillés,  pas  de    danger  qu’il  ne  s’envole  même  sous  les  bourrasques.
              Maintenant que j’ai confiance  en moi, je suis devenu  un passereau courageux et je
              peux libérer mon ami. Les rêves de chacun sont trop sérieux pour qu’on les  prenne à la
              légère.
              Toc,  toc,  tic,  tic      le  bruit  de  mon  bec  résonne    sur    le  sommet    du  moulin.
              Inlassablement, je pique, je casse, je lime…Le miracle  finit  par  se réaliser, la patte
              gauche  se libère puis  la droite ! En un éclair mon bel oiseau se redresse, agite ses
              ailes  mordorées.

              Il ne  se  jette pas dans le vide comme je le pensais, il hésite,  tourne  une dernière  fois
              à droite  puis à gauche. Serait-il ankylosé ou aurait- il oublié les règles de vol depuis
              qu’il remplit  scrupuleusement son rôle de girouette ?

              Tout  à coup, le voilà qui décolle et disparaît   porté par un rayon de soleil. Il  ne me
              reste plus qu’à redescendre dans  mon fourré préféré. Je vais retrouver  mon champ de
              coquelicots et jouer  avec les  lapins de l’année.

              Tiens un nouveau bruit ! .Passons la tête au travers des branches. C’est le ferronnier du
              village  qui façonne un  nouvel  oiseau !















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