Page 62 - Le grimoire de Catherine
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pour faire claquer  les  volets, aux fenêtres sont suspendues des cages dans  lesquelles
              de beaux  oiseaux rouges et verts sont, blottis  les uns   contre les autres. Les rues
              sont pavoisées de banderoles  nous souhaitant la bienvenue.
               Ce grand calme gagne ma voisine qui, volubile, au début de la promenade, chuchote
              maintenant.  Elle  me  confie  qu’elle  est  enceinte  et  qu’elle  goûte  particulièrement  ce
              moment  de  grande sérénité.

              Nous    continuons    notre  progression,  dépassons  les  maisons,    maintenant    nous
              découvrons  des    pelouses    très  bien  entretenues    si    l’on  en  juge  par  leur  couleur
              uniforme, des arbres majestueux tous de la même essence, de la même taille ,avec le
              même  nombre de branches. Je  découvre qu’ils  sont  en tissu. Ca doit  être pour éviter
              qu’en tombant les feuilles  salissent  notre  beau paysage.

              Maintenant, nous longeons un lac. Par cette chaleur, nous allons pouvoir y  plonger nos
              doigts. Comme tout est  bien pensé pour le confort des visiteurs ! Si cette eau  nous
              rafraichit,  elle  ne    nous  mouille  même pas !  D’ailleurs  lorsque  nous  nous    penchons,
              l’eau s’abstient de tout reflet.
              Ici, on a dû lire Cocteau qui conseillait aux miroirs de réfléchir avant de renvoyer les
              images…Nous  voilà    bien    chouchoutés !  Nous  avons    bien  choisi    notre    voyage  et
              apprécions  ce dépaysement. Dés notre retour nous  en  parlerons à nos  amis et  les
              encouragerons à nous imiter. Il faut que je pense  à localiser cet endroit grâce au GPS
              de mon téléphone portable.

              Dommage,  je  viens  de  m’apercevoir  que  ce  dernier  est  déchargé.  Ma  vie  de  semi-
              ermite    m’a  laissé  des    habitudes  de  grande    liberté    souvent  incompatibles  avec
              certaines  contraintes matérielles..

              Je ne suis  pas décidé à ne pas  laisser gâcher  ces moments de bien-être quand je
              peux enfin laisser libre cours  à mon  imagination, nous reviendrons  bien assez vite à la
              réalité ! La  rue devient ruelle, qui a son tour  se mue en chemin. Si cela continue  nous
              allons nous retrouver dans un cul de sac !
               Maintenant au-dessus  de nos têtes, les arbres s’entre-lient, s’entre-embrassent sans
              distinction d’essences. Le laurier aime le cyprès, qui, lui-même penche vers le noisetier.
              Notre route est maintenant à choix  multiples.

              S’avancer vers  un couloir aux parois   bien tracées, bien rectilignes ou s’engager dans
              un  jardin  tantôt potage, puis médicinal, fruitier ou encore  bouquetier. Nous passons
              successivement  du  couvert des charmilles au  découvert  des parterres.
              Tout au bout de l’un d’eux, nous pouvons  apercevoir une colossale silhouette. Piqués
              par la curiosité, nous décidons de  nous en  approcher. Plus nous avançons, plus elle
              semble s’éloigner.

               Nos  efforts  finissent  par  être  récompensés.  Nous  finissons  par  percevoir    qu’il  s’agit
              d’une  immense  statue,  toute    en  bois,    érigée  sur  un  rocher,    entourée    d’un  lac
              protecteur.  Un saule pleureur lui  nimbe la tête  d’une  auréole  feuillue.

              Toutefois peu à peu, certains détails nous paraissent étranges. Cette  tête est porteuse
              de  cornes !    Les  oreilles  sont  pointues  et  les    naseaux  dilatés  semblent  pouvoir



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