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Un        transhumanisme
                                                                 de    Guerre


                                       Artisanal ?







                 S’il y a bien une chose qui est récurrente à travers l’histoire, c’est la guerre. Et, d’après le poli-
                 tologue polonais Lukasz Kamienski, s’il y a bien une chose qui est récurrente dans la guerre,
                 c’est l’usage de drogues et psychotropes en tous genres. Les États ont souvent dû se pencher
                 sur un cruel dilemme, entre le contrôle des stupéfiants consommés par leurs populations, con-
                 sidérés comme nuisibles, et ceux fournis à leurs combattants, indispensables pour améliorer
                 leurs performances au combat.

                 Qu’elles soient naturelles ou chimiquement créées, les drogues peuvent augmenter les capac-
                 ités des soldats avant, pendant et après le combat. Jusque dans les années 1930, la plupart
                 des substances étaient tolérées au sein même des sociétés. Elles étaient consommées aussi
                 bien par le peuple que par les combattants, même si le sujet reste largement tabou dans les
                 armées.

                 Qu’elles soient disponibles dans la nature ou chimiquement synthétisées, les drogues peuvent
                 servir à améliorer les capacités physiques de l’homme : réduire le sommeil et la faim, aug-
                 menter les réflexes, neutraliser la perception des blessures ou de la peur. Elles permettent
                 aussi de le calmer après les combats, pour lutter contre le traumatisme ou les regrets, avec
                 des effets apaisants et décontractants. Enfin, certaines forces ont utilisé des drogues comme
                 des armes contre leurs ennemis, même si cette démarche est restée plus marginale que les
                 deux premières, faute de trouver les bons moyens d’atteindre l’adversaire.




                                              Le cas Captagon




                 Le Captagon, drogue euphorisante, voire déshumanisante, apparaît être de plus en plus utilisée
                 dans les rangs des jihadistes et des candidats aux attentats-suicides.

                 L’auteur de l’attentat de Sousse en Tunisie, en juin dernier, était sous l’emprise du Captagon.
                 Selon Le Point, des seringues du même produit ont été retrouvées dans différents lieux où
                 ont habité Salah Abdeslam, commanditaire présumé des attaques sanglantes perpétrées à Paris
                 vendredi 13 novembre, et certains de ses complices.

                 Le Captagon est constitué de fénéthylline, une amphétamine inscrite sur la liste des substanc-
                 es psychotropes de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) depuis 30 ans. Le produit est
                 réputé pour permettre à qui l’avale ou se l’injecte de se procurer un sentiment de force sans
                 commune mesure, de se sentir invincible. « Comme toutes les autres amphétamines, cette
                 drogue entraîne une résistance à la fatigue, une vigilance accrue et une perte de jugement.
                 Elle donne l’impression à celui qui la consomme d’être tout puissant, d’être le “roi du monde”
                 en quelque sorte », expliquait le professeur Jean-Pol Tassin, neurobiologiste de l’INSERM et
                 spécialiste des addictions, dans les colonnes du magazine Sciences et avenir.
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