Page 33 - L’aventure, l’ennui, le sérieux V. Jankélévitch
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L’AVENTURE – V. JANKÉLÉVITCH 33
QUELLES AVENTURES ? L’APPROCHE TYPOLOGIQUE
L’AVENTURE MORTELLE ET LA MORT DE L’AVENTURE
Sans surprise, c’est d’abord la finitude humaine qui fournit le modèle de l’aventure, si l’on consi- dère la vie comme un tout, comme un caprice de l’éternité inerte. Mais Jankélévitch ne sacrifie pas à cette rhétorique facile de «l’aventure humaine » : la vie n’est une aventure que par façon de parler, dans la mesure où l’imminence de la mort n’habite pas chacun de ses instants. Or c’est cette imminence, cette possibilité de la fin, qui plane sur l’aventure effective, celle où l’impré- visibilité côtoie le danger ou tout au moins l’insé- curité. L’aventure est engagée dans un processus qui est voulu, mais non maîtrisé. Ce qui est ainsi choisi activement, c’est la perte du contrôle sur l’environnement extérieur et le devenir dans lequel nous nous laissons happer. D’où l’analogie entre l’aventure et le vertige : l’appel des cimes tutoie l’appel de l’abîme, parce que la fascination est un mixte de désir et d’effroi, parce que ce qui est désiré n’est pas tant l’effroi que la tentation, épreuve d’une vitalité qui s’enfle en succombant. Les penseurs allemands du XIXe siècle ont beaucoup glosé sur ce genre d’ambivalences,
 






























































































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