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François Guizot par sa mère, féministe engagée, était présidente de l’Union Française pour le Suffrage des femmes (UFSF). Dès le début de la guerre, elle s’était engagée dans l’aide aux victimes du con it en faveur notamment des réfugiés évacués d’Alsace-Lorraine, et avait activement participé au développement de « foyers du soldat » pour les blessés soignés à l’arrière et convalescents.
et le plus jeune six semaines, des dames m’ont suppléée pour les malades et les quelques cultes qui ont été faits dans la sacristie pendant que j’étais alitée ».
Mme de Witt-Schlumberger avait établi un court questionnaire en six points dans lequel elle demandait aux femmes de pasteurs mobilisés d’expliquer ce qu’elles avaient fait dans leurs paroisses pour continuer l’œuvre de leur mari
Elle a assuré une grande partie des enterrements et dit en avoir déjà fait dix-neuf (5).
Marguerite Marty a lu cet appel dans le Journal du protestantisme libéral Evangile et Liberté que le couple recevait (4).
La consultation des registres paroissiaux de Ver- noux, où  gurent les procès-verbaux signés par Mme Marty, montre qu’elle a remplacé son mari pendant un an jusqu’en mai 1916. Lors de permissions, ce dernier contresignait les actes de baptême ainsi que le seul acte de mariage correspondant à cette période, avec la men- tion « Vu et approuvé ».
« Je fais tout ce que puis pour la paroisse de mon mari » dit-elle en préambule avant d’en expliquer les raisons et détailler ses actions.
Elle ajoute dans sa lettre qu’elle a assuré la publication mensuelle du bulletin paroissial Le Lien, publication « à laquelle on tient beaucoup par ici, de sorte qu’elle a toujours paru depuis la guerre » (6).
Parlant de la paroisse de Vernoux, elle souhaite que son mari « la retrouve vivante », ajoutant « ne pas donner au mobilisé une inquiétude constante sur le sort de ce qu’il a laissé derrière ; ne pas avoir pour moi-même le remords d’avoir hésité devant une tâche que j’étais à même de remplir ; les pasteurs touchant leur traitement, je ne voulais pas toucher l’argent pour m’être croisé les bras ».
Le tirage de ce bulletin qui est de 900 exemplai- res en 1917 nous donne une idée de l’importance de la communauté protestante d’alors dans la région de Ver- noux et, de fait, de l’implication et des responsabilités de Mme Marty pendant cette période.
Elle précise ensuite que la paroisse étant très étendue avec deux annexes et 6 km de rayon, elle n’a pas pu faire de visites à la campagne et ajoute : « ayant beaucoup trop à faire dans le bourg et ayant moi-même quatre tout petits enfants dont l’aîné n’a pas cinq ans
5. D’après les registres paroissiaux consultés et les procès-verbaux établis, elle a assuré également douze baptêmes pendant cette période. Compte tenu de la présence au front des jeunes hommes, le nombre de mariages célébrés est évidemment très faible.
Marguerite Marty a pris en charge les services re- ligieux après Pâques 1915. Elle assure donc les cultes dominicaux auxquels s’ajoutent « l’école du diman- che » et le catéchisme.
 Dans sa lettre, Mme Marty explique qu’elle a beaucoup hésité à répondre à cet appel car, « n’aimant pas faire étalage », selon son expression, mais que si ce qu’elle fait peut servir, elle est consentante pour apporter son témoignage.
La femme du pasteur anime la vie de la paroisse avec des réunions hebdomadaires de chant et veille à la tenue des réunions du Conseil presbytéral.
Le bulletin comprend des nouvelles locales dont une rubrique « Morts au Champ d’honneur » donnant régu- lièrement le nom des paroissiens de Vernoux morts au combat avec généralement des indications sommaires sur la date et le lieu ainsi qu’une rubrique « Citation » pour ceux que la hiérarchie militaire a distingués pour leur bravoure. Alors qu’il est au front, Jacques Marty, soucieux de maintenir le contact avec ses paroissiens à travers cette publication, rédige des « Méditations » et des « Lettres pastorales », les encourageant à la pa-
 4. La paroisse protestante de Vernoux est de tendance « libérale » considérée comme progressiste par opposition à la tendance « orthodoxe » plus conservatrice. Jacques Marty sera par la suite une  gure importante au niveau national du protestantisme libéral.
6. Le Lien, Bulletin mensuel des Églises protestantes de Vernoux et Saint-Jean-Chambre, AD07 PER 1402/1. Cahier de Mémoire d’Ardèche et Temps Présent n°138, 2018 94

















































































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