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La Chaloupe - décembre 2017
ral (Ploumoguer et Roscoff). Nous reviendrons plus
Les transmissions homonymiques
loin sur les raisons de cette particularité.
L’une des caractéristiques essentielles des modali-
tés de la nomination au Bas Moyen Âge et à l’époque L’attribution à un enfant du nom de son parrain ou
moderne est la transmission fréquente au nouveau-né de sa marraine était une marque d’honneur de la part
6 des parents à l’égard de ces derniers. Le nom était à ce
du nom de son parrain ou de sa marraine . J’appelle ce
procédé la transmission homonymique. Les cartes des titre un marqueur de la filiation spirituelle et indirecte-
figures 8 et 9 attestent du caractère normatif des trans- ment il matérialisait également les liens du compérage,
e c’est-à-dire les engagements de solidarité qui se
missions homonymiques en Bretagne au 16 siècle.
nouaient au moment du baptême entre le père de l’en-
Les taux de transmissions sont particulièrement fant et le parrain. Tout porte à croire que lorsque les
élevés dans toute la partie est de la péninsule où géné- taux de transmissions homonymiques étaient élevés,
ralement plus de 90% des filles portent le nom de les attentes en matière de compérage étaient également
l’une des marraines ou une forme féminisée du nom élevés : plus on honore quelqu’un, plus on attend de
du parrain. Il faut relativiser les données indiquées
lui en retour.
pour quelques paroisses du Penthièvre (partie est du
diocèse de Saint-Brieuc) car les relevés de baptême de Une fois le principe de la transmission homony-
ce secteur ne renseignent parfois que sur l’identité des mique validé par les parents, il restait à choisir dans le
seuls premiers parrains et marraines, ce qui a eu pour collège des parrains et marraines celui ou celle qui
effet de sous-évaluer le taux des transmissions homo- serait le nommeur référent. Pour une fille, trois situa-
nymiques. Les taux de transmissions sont très élevés tions pouvaient se présenter :
dans le Trégor et le Goëlo mais plus faibles en Cor-
nouaille (de 54 à 81%). Dans le Léon, ils sont éton- · Elle recevait le nom de l’une de ses marraines,
namment bas dans deux paroisses du litto- · Elle recevait une forme féminisée du nom de son
parrain,
6 - C’est le cas en France. Cela ne semble pas avoir été le cas en · Elle recevait un nom qui était à la fois celui de
Espagne et en Italie. Cf. Ehijkkj Clmnilo, La parenté spirituelle à l’une de ses marraines et une forme féminisée du nom
Lyon sous l’Ancien Régime : prénomination, vie sociale et vie reli-
de son parrain.
gieuse. Thèse de doctorat soutenue à Lyon le 18 juin 2015, Univer-
Dans les deux premiers cas, nous parlerons d’attri-
sité Jean Moulin Lyon 3, P. 172-173 .
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