Page 49 - MOBILITES MAGAZINE N°52
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Technologies & innovations
recyclage
ici et propulsent les automobiles, bus, vélos, trottinettes, etc., sont aujourd’hui considérées comme inaptes au service dès qu’elles ont perdu entre 20 et 30 % de leur ca- pacité.
Si la réutilisation de ces batteries dans le cadre d’une seconde vie fait l’objet de nombreuses études, notamment dans le domaine pos- sible du stockage d’énergie, les problématiques de reconfiguration et de surveillance électronique qu’impliquerait une telle (ré)utili- sation font douter (entre autres RTE) de la pertinence technique autant qu’économique de cette orientation. C’est donc plutôt vers le recyclage que doit aujourd’hui se diriger la filière.
Mais avant toute chose, il faut rap- peler qu’à l’heure actuelle, règle- mentairement, l’obligation de recy- clage d’une batterie lithium-ion n’est que de 50 %, alors qu’elle est de 90 % pour une batterie au plomb. Autre rappel, il existe deux procé- dés de recyclage de batteries : la pyrométallurgie et l’hydrométal- lurgie. Dans les deux cas, la batte- rie est tout d’abord réduite en pou- dre, avant que les différents composants métalliques ne soient extraits, soit à haute température, soit par le passage dans différents bains de composés chimiques. Les deux systèmes peuvent d’ailleurs se voir combinés. Si les chiffres concernant ce secteur particulier sont difficiles à cerner à ce jour, l’Europe afficherait une capacité de recyclage de l’ordre de 15000 tonnes de batteries par an. Cepen- dant, selon une étude réalisée par le Comité stratégique de filière (CSF) mines et métallurgie, les ca-
pacités européennes de recyclage ne devraient suffire que jusqu'en 2026, c’est-à-dire demain. En effet, dès 2027, date à laquelle les bat- teries usagées des véhicules ven- dus aujourd’hui arriveront en fin de vie, il faudra recycler 50000 tonnes de batteries chaque année. Et compte tenu de la courbe de déploiement de ces mêmes véhi- cules électriques, ce chiffre pour- rait doubler en 2028, pour progres- sivement atteindre 700 000 tonnes en 2035 ! Se posera alors le véri- table problème logistique de la collecte de ces batteries, au même titre que celui de la rentabilité de l’industrie du recyclage.
Le problème du modèle économique
Jusqu’à ce jour, le modèle écono- mique du recyclage des batteries lithium-ion reposait pour l’essentiel sur la haute valeur des métaux rares qui composent ces dernières, et tout spécialement sur le prix très élevé du cobalt. Les évolu- tions technologiques évoquées précédemment, ainsi que les va- riations du cours de ce métal, lais- sent de fait entrevoir la nécessité d’une évolution du modèle éco- nomique des recycleurs. Les in-
Attendre une potentielle technologie
miraculeuse de batterie propre, relève probablement
de la chimère...
1) Les pays producteurs de cobalt : Australie, Botswana, Brésil, Belgique, Canada, Chine, Cuba, France, Finlande, Japon, Maroc, Nouvelle Calédonie, Norvège, Russie, Afrique du sud, Ouganda, RDC (la moitié de la production mondiale) et Zambie.
2) Trois pays se partagent près de
50 % des gisements découverts : l’Australie, la Nouvelle Calédonie et le Brésil. L’estimation des réserves mondiales s’élève à 130 millions de tonnes.
3) Article publié
sur le site Transitions & Energies le 22 septembre 2021..
vestissements colossaux qui seront nécessaires à ces industriels pour absorber la masse de batteries à venir seront-ils compensés par des gains à la hauteur des enjeux ? Pourront-ils adapter leurs proces- sus de recyclage, et donc leur ren- tabilité, aux diverses technologies qui émergeront de la recherche ? Et si non, que ferons-nous réelle- ment de ces tonnes de batteries usagées ? Autant de questions qui doivent être posées aujourd’hui, sachant que, pour Serge Pelissier, « attendre une potentielle tech- nologie miraculeuse de batterie propre relève probablement de la chimère... ». En ces temps d’argent magique, peut-être devrait-on in- vestir massivement dans cette in- dustrie du recyclage, avant d’être submergé. z
PIERRE COSSARD
MOBILITÉS MAGAZINE 52 - OCTOBRE 2021 - 49