Page 49 - MOBILITES MAGAZINE N°57
P. 49

 Opérateurs & réseaux
 public, c’était la meilleure solution. C’est le fameux phénomène du NIMBY (Not In My Back Yard, lit- téralement « Pas dans mon jardin » ndlr).
: Le BIM a-t-il permis un apport
à la conception et à
la construction du Grand Paris Express ?
LP : Tout d’abord, je vais rappeler ce qu’est le BIM, car ce sigle a trois significations différentes qui se complètent. BIM signifie Building Information Model/Modeling/Ma- nagement. Auparavant, on conce- vait les projets via l’aide d’une planche à dessin et d’un crayon. Avec l’arrivée de l’ordinateur, les ingénieurs s’en sont saisis et ont conçu les projets avec ces outils. Les ordinateurs étant toujours plus puissants, la 3D est apparue, et il est possible de complexifier le niveau de la construction. C’est un peu comme si vous construisiez un Lego : en fonction de vos contraintes, vous donnez des caractéristiques différentes aux faces, vous enrichissez et com- plexifiez votre objet. Le BIM
consiste à construire l’objet de ma- nière virtuelle en y ajoutant tous les détails possibles, y compris avec les mouvements à bord. Une simulation via une maquette BIM permet de planifier les futurs équi- pements et de prendre en compte toutes les contraintes, notamment les trous pour les différents ré- seaux (courants forts, courants fai- bles, ventilation ...).
Vu la complexité du projet du GPE, l’utilisation du BIM a été une évi- dence pour la Société du Grand Paris (SGP) qui l’a imposé pour la construction des ouvrages. Cette méthode permet de résoudre les problèmes de logistique et d’or- ganisation et cela permet de ga- gner du temps. Cette méthode génère des dépenses initiales plus élevées que les méthodes de conception classique, mais des économies sont générées lors de la réalisation du projet. Est-il pos- sible de le prouver ? C’est mal- heureusement difficile. Néanmoins, j’ai l’intime conviction que cela sé- curise les réalisations, qu’on gagne du temps et que l’on réalise des économies sur les investissements, avec, comme précisé, des dé- penses plus élevées au début des projets. Le fait de devoir engager rapidement d’importants moyens financiers dans un projet est d’ail- leurs une des raisons qui retarde le déploiement rapide du BIM pour la conception des chantiers.
: L’utilisation du BIM a-t-elle permis
d’appréhender l’ensemble des problématiques rencontrées, et notamment la nature géologique
des terrains rencontrés, dont on sait qu’ils sont particulièrement compliqués en Ile-de-France ?
LP : Le BIM permet de poser les bonnes questions, mais il ne rem- place pas les études géologiques
nécessaires. Etudes qui sont sou- vent rendues compliquées en mi- lieu dense, puisqu’on ne peut pas effectuer des carottages depuis le sol. Il faut percer en biais, ce qui génère du bruit, des nuisances, sans compter que du fait de l’ex- trême densité de l’Ile-de-France, lorsqu’on réalise un trou dans le sous-sol, on tombe toujours sur un autre trou (égoûts, réseaux de chaleur urbains, réseaux télé- coms... ). Le BIM ne peut pas ré- soudre cette complexité. J’ajoute que le BIM a été utilisé pour la conception de toutes les gares et en partie pour les tunnels.
: Quel est l’avenir du BIM dans les chantiers
de construction selon vous ?
LP : Il faut savoir que le BIM n’est pas une technique « nouvelle », puisqu’elle date des années 1990. C’est un système antérieur et l’on peut voir des parallèles dans d’au- tres industries, qui ont subi le même processus. Néanmoins, cette manière de travailler entraîne des bouleversements radicaux dans le secteur du BTP, où l’expérience acquise et passée est prévalente. Cela génère une résistance à la nouveauté, d’autant que le secteur du BTP a une tendance à vivre avec ses défauts. Nous sommes donc loin d’être en avance sur le sujet en France. Par rapport à d’au- tres pays qui utilisent le BIM depuis plusieurs années maintenant, la France présente des différences géographiques, logistiques et cul- turelles qui font qu’il y a un conser- vatisme. Celui-ci fait que le dé- ploiement du BIM progresse moins vite que dans d’autres pays. Néan- moins, le BIM est l’avenir du secteur de la construction, c’est d’ailleurs pour cela que nous l’avons intégré dans toutes nos formations au CESI, où nous avons développé des Masters spécialisés BIM. z
PROPOS RECUEILLIS PAR JÉRÉMIE ANNE
Mobilités
magazine
 Mobilités
magazine
 Mobilités
magazine
MOBILITÉS MAGAZINE 57 - MARS 2022 - 49
   










































































   47   48   49   50   51