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 Ferroviaire / POLITIQUE
ne l’étant pas. Précisons également que ces lignes utilisent le même matériel, en l’occurrence des rames AGC Z 27500. Grâce au cadencement, les rames Z27500 de la ligne Yvetot-Elbeuf abattent 627 km/jour, « pourtant perfectible » constate l’étude et les personnels travail- lent plus de 1 100 heures/an. Les rames af- fectées aux deux autres lignes circulent 265 km/jour et les personnels travaillent moins de 400 heures/an ... Cependant, l’of- fre ferroviaire doit être cadencée intelli- gemment, et être présente en nombre, comme l’a expliqué Bruno Meignin du Ce- rema lors d’un colloque au Sénat le 3 juin dernier.
Un couplage bénéfique
Une autre manière d’augmenter la per- formance du service est de diamétraliser certains services. Derrière ce terme, se cache le fait de coupler deux liaisons
toutes deux terminus dans la métropole principale pour en faire une ligne directe. Les avantages majeurs sont bien évidem- ment de diminuer l’occupation des voies de la gare principale, d’augmenter l’offre ferroviaire à cout constant, voir même de la diminuer, puisqu’il y a plus de trains avec autant de moyens engagés ... Le Ce- rema a ainsi mené une étude sur une liai- son Lisieux-Coutances, par la diametrali- sation des lignes Lisieux-Caen et Caen- Coutances. Seraient ainsi nécessaires quatre rames AGC B 82500 , qui circule- raient en UM 2, avec une cinquième rame, qui serait la rame de réserve et disponible pour la maintenance. Les retournements aux deux extrémités s’effectueraient en 15 minutes, et les rames circuleraient 380 000 km/an et les agents affectés à ce service 1 100 heures/an.
Cependant, précisons immédiatement qu’il faut prévoir le bon matériel et la bonne composition au bon moment. Le matériel roulant doit être suffisamment capacitif et en même temps ne pas l’être trop pour éviter de transporter des banquettes vides. Rappelons également l’adage « la main- tenance doit s’adapter à l’exploitation, et non l’inverse », qui nécessite de réaliser la maintenance des matériels pendant les creux de roulement (en particulier de nuit) afin de permettre le maximum de circu- lations en journée.
On pourrait penser que ce que l’on vient de développer ne sont que des exemples théoriques. Cependant, plusieurs exemples, en particulier allemands, viennent prouver que l’augmentation de la fréquentation vient également par une hausse de l’offre. Les premiers résultats du modèle mon- trent ainsi que sur de très nombreuses lignes, l’offre peut être doublée à coût de production à peine supérieur, et le déficit serait réduit, de par l’arrivée de nouvelles recettes.
Cependant, les péages des services ré- gionaux devront être suffisamment inci- tatifs pour que cette hausse d’offre puisse se réaliser sans plomber les finances des régions, autorités organisatrices des ser- vices TER. On rappellera l’analyse de l’ART (Autorité de Régulation des Transports) sur les péages ferroviaires dans sa der- nière étude sur l’ouverture à la concur- rence du transport ferroviaire de voya- geurs publiée en février 2022, qui indique que le système des péages doit favoriser « l’utilisation effective et optimale » de l’infrastructure ferroviaire. Or, les péages ferroviaires en France sont parmi les plus élevés d’Europe, avec une redevance d’ac- cès pour les services conventionnés (dont font partie les TER) de 5,98 € par train- km (hors redevance d’accès), plutôt dans la fourchette haute des pays de l’Union Européenne. Elle déplore également que pour la redevance de marché due par les services conventionnés, « l’unité de tari- fication actuelle (le train-km) peut décou- rager les circulations de train addition- nelles car elle n’est liée ni au remplissage effectif du train, ni aux revenus suscep- tibles [d’être] générés ». Elle préconise donc la mise en place d’un tarif binomial, afin que la mise en route d’un train sup- plémentaire ne génère pas uniquement son coût marginal (c’est-à-dire les coûts marginaux de maintenance des rames, de l’infrastructure et la consommation éner- gétique du train). L’ART indique également que « les améliorations relatives à la structure tarifaire doivent être engagées en premier [...] pour assurer la possibilité d’une utilisation optimale du réseau ». En ces temps où tout un chacun souhaite ob- tenir des fonds supplémentaires pour la régénération du réseau et doubler les tra- fics ferroviaires en effectuant du report modal, voici un chantier qui devrait être mené... Jérémie Anne
  Les hypothèses prises pour l’étude
Plusieurs hypothèses ont été prises en compte par le Cerema, qui s’est basé sur des ressources en open data, des études publiques ainsi que des documents ac- cessibles pour tous (fiches horaires dis- ponibles sur le site de l’opérateur, Do- cuments de Référence du Réseau (DRR) et Documents de Référence des Gares (DRG) produits par SNCF Réseau). Les informations concernant le matériel rou- lant proviennent d’articles de presse ou de sites type Wikipédia, qui pour certaines informations sont fiables. Plusieurs coûts proviennent également de plateformes open data, ainsi que de calcul basés sur les règles du RH 077. Des hypothèses ont été prises sur des journées de service dédiées par lignes ainsi que la mesure de la performance d’une organisation et non d’un opérateur type.
   70 MOBILITÉS MAGAZINE 59 - NOVEMBRE 2022
  























































































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