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J e descendis précipit amment l' escalier pour me préparer, et f iler à l' école me
changer les idées comme t ous les j ours. I l ét ait huit heures, le t emps passait
lent ement . Le prof esseur parlait mais le son n' arrivait pas j usqu' à mes or eilles,
j e voyais j ust e remuer ses lèvres semblables à la houle dans l' océan. La mat inée
passa et t oucha à sa f in. J e suivis le mouvement des élèves et me r endis au
réfect oire, comme t out s les j our s. Une t able seule m' ét ait dest inée. J ' observais
les aut res, int égrés à la sociét é, pendant que moi, j e rest ais enf ermée dans ma
rout ine de solit ude. Un événement ét range me pert urba : de maladresse, une
camarade se coupa. J e sent is mon sang se réchauf f er, mes nerf s se cont ract er,
une envie irrépressible d' aller t oucher, sent ir le liquide rouge qui s' écoulait de la
plaie. J'attrapai mon sac brutalement et m'en allai sous les regards étonnés.
La j ournée se t er mina. Sans passer par la maison, j e pr is un raccourci qui menait
à la f orêt . Le chemin devenait broussailleux, des épines barraient le passage. J e
m' enf onçais de plus en plus dans ce sombre endroit , et mon c ur bat t ait de plus
en plus vit e. J ' aperçus une charmant e clairière, j e me rendis dans cet endroit
paisible qui me r assurait et mapaisait . En masseyant , ma main dér apa et
s' écorcha violemment . Une envie semblable à celle de ce midi me prit , ce liquide
rouge qui m' int riguait t ant , ét ait maint enant à ma port ée. Sans m' en rendre
compt e, ma main f rôla mes lèvr es, et le sang s' y déposa. Une sensat ion de bien
êt re m' envahit . Mon c ur bat t ait , mon sang ce circula dans mes veines D' où
venait cet t e envie ? J ' avais l' impression que pour la première f ois, j e pourrais
combler ce vide, qui me rongeait depuis si longt emps. Que si j e mimprégnais de
ce liquide, je pourrais me sentir apaisée, et si c'était le remède ?
Mes yeux se posèrent d' arbre en arbre, sans savoir vraiment quoi r egarder . Mes
j ambes voulaient ret ourner dans la maison, au chaud. Mais ma raison me disait le
cont raire. Ma main me f aisait mal, mais cet t e douleur me procurait du plaisir. J e
sent ais en moi une puissance. C' ét ait comme si j e redevenais moi, la vraie Alice
qui souriait et aimait la vie, ét ant séparait de ma t rist esse et ma solit ude. Mes
paupières se fermèrent.
Un vent f r oid caressa mes j oues. J e me r éveillai, inquièt e, le ciel ét ait noir. Le
silence régnait . A t ât ons ver s la maison.Un quart d' heure ét ait passé mais le
t emps me paraissait inf ini. J e r econnus la maison, t out es les chambres ét aient
éclairées. Ma mère adopt ive, sort it , f urieuse en me r econnaissant . Ses sourcils
ét aient f r oncés et seule la lune éclairait ses t rait s f urieux, dessinés sur son
visage.
J e rent rai dans ma chambre la t êt e baissée. J e f ermai la port e,m' assis sur mon
lit et j e regardai mon doigt couvert de sang sec qui f ormait une f ine pellicule de
croût e. J ' ent endis la voix de ma mère adopt ive derrière ma port e. J e