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  Dès que quelque chose ne va pas, le risque augmente : ici parce qu’il faut se pencher par-dessus bord et mettre les mains dans l’engin de pêche.
un câble qui se coince et se libère soudainement, c’est l’accident. Un filet qu’on risque de perdre dans le gros temps ; il faut aller passer très vite un bout, un croc, un palan pour le sécuriser. C’est un risque.
« Rien ne remplace le temps passé par chacun à analyser les risques. »
En Normandie, 60 % des accidents de travail à la pêche arrivent pendant la manœuvre des engins de pêche ou le traitement des captures sur le pont. 25 % touchent les mains et les doigts. Les gants sont obligatoires à bord. Encore faut-il qu’ils soient portés. Comme les casques, les chaussures de sécurité...
Comme pour les chutes à la mer, rien ne remplace le temps passé par les intéressés à analyser les risques spécifiques de leur activité.
Un exemple évoqué par Alain Dervout à propos des grands thoniers : la chute de poisson « maillé ». Traduction : quand l’énorme poulie remonte le non moins énorme filet très haut au-dessus du pont, si on a oublié un thon de 80 kg coincé dans une maille et qu’il se décroche au-dessus d’un matelot, il peut le tuer.
TROP D’ACCIDENTS À QUAI
C’est une des surprises que réserve ce sujet. En Normandie, 35 % des accidents du travail ont lieu navire à quai. Près de 6 % pendant l’embarquement ou le débarquement des marins ! Des proportions voisines doivent se retrouver dans d’autres régions. Philippe, déjà évoqué, raconte qu’il devait démonter une série de poulies pendant le retour de pêche de son thonier à l’île d’Yeu. Il en restait une à enlever quand le bateau est arrivé au port. Il a voulu aller trop vite, est monté sur une échelle mal assurée qui a glissé, et il s’est cassé la jambe. D’autres accidents sont liés à la manutention de la pêche.
TROP D’INCENDIES
La lecture des récits de sauvetage de ce magazine, (voir en page 12) comme celle des rapports du BEA mer, surprennent par le nombre d’incendies, souvent non maîtrisables. Dans la plupart des cas, l’équipage est récupéré sain et sauf, mais un jour cela pourrait mal tourner. La seule chance de maîtriser un feu à bord, c’est de l’attaquer vite. L’équipage étant souvent très occupé sur le pont, seules des alarmes incen- die efficaces peuvent alerter sur ce qui se passe en dessous. Encore faut-il qu’elles soient ajoutées sur les plus vieux bateaux... et qu’elles fonctionnent...
TROP DE COLLISIONS
Ce ne sont pas toujours, heureusement, des accidents meurtriers. Mais le BEA mer s’est ému du nombre trop élevé de collisions impliquant des navires de pêche au point d’y consacrer une étude particulière il y a quelques années. On peut également s’étonner du nombre d’échouements pour des marins expéri- mentés naviguant dans des zones qu’ils connaissent bien (dix-sept interventions de sauveteurs en 2018). Il n’est certainement pas facile de surveiller à la fois la route, la manœuvre de pêche et ce que font les bateaux environnants, surtout quand on est fatigué. Les équipements électroniques modernes, notam- ment le GPS, l’AIS (positionnement par VHF) et le radar devraient quand même permettre de progresser.
TROP DE VIEUX BATEAUX PLUS OU MOINS BIEN ENTRETENUS
Dans l’accidentologie du BEA mer (voir page 21), on est frappé par l’âge important des bateaux. Dans les causes d’intervention des Sauveteurs en Mer (tableau page 22), on est surpris par le nombre d’interventions pour avaries de moteur (146), de barre (20) et de voies d’eau (12), celles-ci étant souvent occasionnées par des ruptures sur les circuits d’eau de mer, d’après le BEA mer.
Pour de nombreuses raisons qui sont loin d’être toutes de la responsabilité des armements et des patrons (réglementation, financements), la flotte de pêche est trop vieille. Mais l’entretien, indispensable sur des bateaux mis à rude épreuve, est bien de la res- ponsabilité des armements et des patrons. Problème de disponibilité en mécaniciens ? On a déjà évoqué les difficultés de recrutement de la filière. Manque de temps ? Le plus souvent, heureusement, les sau- veteurs gèrent. Mais on imagine les conséquences de pannes de motorisation par gros temps, courant fort, près des rochers etc.
TROP DE CHAVIREMENTS
On associe spontanément le risque de chavirement aux petits dériveurs plutôt qu’aux lourds bateaux de pêche. Et pourtant... Le chavirement est souvent dramatique parce que soudain. Difficile d’enfiler un gilet de sauvetage si on ne le porte pas déjà. Pas le temps de déclencher le radeau de sauvetage. Pas le temps d’atteindre la radio.
Un navire de pêche, même d’apparence large et stable porte d’importantes superstructures lourdes. Celles-ci manipulent des charges lourdes bougeant
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SAUVETAGE #150
 ©IMP














































































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