Page 39 - Islenska
P. 39

spacieux. Une voile striée de rouge et de blanc trônait sur le mât central. J’étais médusée. Ce bateau me rappelait une bande dessinée que je lisais petite. Une bande dessinée sur les vikings. Je réalisais alors que le navire sur lequel je me trouvais n’était autre qu’un drakkar (ou plutôt, comme je l’apprendrai plus tard, un langskip, navire de guerre viking). J’en étais bouche bée. À tel point que sans le vouloir, je me redressais, ébahie par ce nouveau phénomène. J’admirais les hommes, pensant inconsciemment être invi- sible à leur yeux. Ils étaient grands, forts, por- taient tous épée, bouclier et moustache. Dans le tumulte, je ne parvenais pas à distinguer leurs ennemis. J’étais sidérée, paralysée. Quand, dans un éclair, un des guerriers me repéra. Sans ré- fléchir, il se rua sur moi moulinant de son épée. J’étais terrifiée, incapable du moindre geste, ni du moindre mot. Sentant ma dernière heure, je fermais les yeux aussi forts que possible, in- voquant le grand Sigurjón, l’attendant ardem- ment. Je marmonnais des prières islandaises, faites de ‘skýr, de ‘gódan daginn’, de ‘takk fyrir’ et autres ‘Islenska’ ou ‘Þórr’. Je n’avais aucune idée de ce que je faisais ou de ce que je ra- contais mais le sanguinaire viking assoiffé de meurtres sembla discerner mes folles prières. J’entrevue son regard dubitatif. L’épée encore prête à frapper, il scruta mon visage. Il hésitait. Moi, j’étais piteuse, à genoux, étranglée par la peur, implorant, répétant inlassablement Þórr, puisque ce seul mot avait réussi à le ralentir. C’est alors que son regard se porta sur l’amu- lette offerte par Hjalti et Lilja. Le bras du viking acheva son geste. Je sentis le froid de l’épée sur mon cou. Mais au lieu de le trancher, le lame


































































































   37   38   39   40   41