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Une croissance commerciale difficile à évaluer
« Les aides régionales et nationales ne manquent pas durant la phase d’amorçage de medtech innovantes. Les vraies difficultés commencent après l’obtention du marquage CE. Car la commercialisation coûte autant que la R&D. Depuis la création de Theraclion, nous avons déjà investi plus de 50 millions d’euros, dont 80 % pour la R&D et le développement clinique. La procédure du forfait innovation, mise en place par le ministère de la Santé, devait nous permettre d’accéder rapidement au marché hexagonal. Mais son coût exorbitant et la complexité
de l’essai clinique demandé nous ont conduits à arrêter la démarche. Cela compromettait grandement notre trésorerie. Aujourd’hui, il nous faut faire face au retournement du marché boursier européen qui a du mal à appréhender la durée de nos phases de croissance commerciale. »
David Caumartin,
pdg de Theraclion.
Des signaux positifs malgré un marché maussade
« Le changement de décennie que nous vivons aujourd’hui est une période charnière. La reconstruction d’organes humains par impression cellulaire, le premier médicament développé grâce à l’intelligence artificielle et les premières thérapies géniques enregistrées le montrent bien. Ces développements se caractérisent par des besoins et des durées de financement importants. Consciente des difficultés des entreprises healthtech à trouver des fonds pour développer leurs actifs "late stage", France Biotech a organisé avec succès la première édition du HealthTech Investor Days (HTID) en juin 2019. Un évènement qui a réuni une centaine d’acteurs
internationaux du financement de l’innovation en santé. Dernière mesure prise par les pouvoirs publics : la mobilisation de plus 6 milliards d’euros issus du privé comme du public. Cette mesure apporte un signal positif à notre écosystème. »
Franck Mouthon,
président de France Biotech et pdg de Theranexus.
pénalisent aujourd’hui l’ensemble des entreprises de technologie médicale . Les investisseurs se détournent de chiffres d’affaires jugés décevants et de business plans trop ambitieux .
Des introductions mal préparées
Même son de cloche chez Seventure Partners, l’un des leaders européens du capital innovation . Fort de 750 M€ sous gestion, il a introduit vingt-six entreprises en Bourse . La présidente du directoire de cette société de gestion, Isabelle de Cremoux, ne cache pas sa déception . « Les performances financières annoncées n’étant pas au rendez-vous, une défiance et un désamour se sont installés . » Elle identifie trois catégories
de medtech en fonction de leur business model . Dans la première catégorie (le business model conventionnel), elles misent sur un chiffre d’affaires dégagé par la commercialisation de leur produits marqués CE . La seconde catégorie (modèle des biotech) est celle où les entreprises se vendent avant même d’avoir réalisé un chiffre d’affaires . Elles misent avant tout sur la R&D et la réussite d’études cliniques complexes mais prometteuses . Enfin, la troisième catégorie regroupe les entreprises qui combinent le statut de medtech, d’entreprises du digital et d’opérateurs de big data . « Si les deux premières catégories intéressent peu, les medtech digitales, plus récentes, n’ont pas encore enregistré d’échec . D’où
l’attractivité qu’elles exercent auprès des investisseurs publics et privés », poursuit Isabelle de Cremoux .
Le marché peut être retourné
Depuis deux ans déjà les investisseurs s’éloignent des medtech conventionnelles . D’ailleurs il n’y a eu aucune introduction en Bourse, l’année passée . Les analystes optimistes du marché tablent, malgré tout, sur une reprise d’ici deux ou trois ans . Quelques success stories ne manqueraient pas de relancer l’intérêt de la Bourse pour ce secteur . Cédric Garcia, associé du cabinet d’audit EY, propose quelques orientations pour retourner le marché . « Trois facteurs pourraient amorcer une reprise des investissements "late stage" . Les fonds cross over des sociétés de capital-risque, véritables alternatives aux recours précoces à la Bourse ; l’orientation de l’épargne vers les valeurs technologiques ; et la concentration du secteur en France avec des partenariats industriels . » Chacun sait ce qui lui reste à faire . . .
Bernard Banga, MD Report
(1) Avec des marchés règlementés en Bel- gique, France, Irlande, Norvège, aux Pays- Bas, au Portugal et au Royaume-Uni .
(2) « Panorama France HealthTech 2019 » . France Biotech, EY, Euronext et QBE France, février 2020 .
De la difficulté à convaincre les places boursières
« L’introduction en Bourse a permis de compléter le financement du développement de SpineGuard et de relayer ainsi les capitaux- risqueurs nous ayant accompagnés depuis la fondation en 2009. Grâce à la Bourse, nous avons aussi gagné en visibilité, en maturité et grandi mais au prix de contraintes importantes de communication et de reporting financier. Par ailleurs, accéder et pénétrer des marchés à un niveau permettant d’atteindre le succès d’une technologie médicale innovante nécessite bien souvent, en cours de route, des ajustements de design et de stratégie. Cette réalité n’est pas toujours compatible avec les
attentes des marchés boursiers. Enfin, une réflexion s’impose sur la
pérennité des mesures fiscales incitant à investir dans nos valeurs technologiques. »
Pierre Jérôme,
président de SpineGuard.
Stéphane
Bette, directeur général de SpineGuard.
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#23 • mars 2020
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