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INTELLIGENCE ARTIFICIELLE
Les CHU s’engagent
Le cabinet EY s’est penché sur la pénétration de l’intelligence artificielle (IA) au sein des centres hospitaliers universitaires français.
les utilisateurs et chez les patients, qui se traduit par une difficulté d’acceptabilité sociale . 51 % des répondants affirment ne pas envisager de se fier à un diagnostic médical établi sans intervention humaine, contre seulement 21 % de réponses positives . 27 % ne se prononcent pas . Des médecins et des soignants sont également dubitatifs devant la complexité d’appréhender les résultats fournis par les algorithmes d’intelligence artificielle . « L’humain ne maîtrise plus toutes les étapes du processus et fait face à des résultats qui sont parfois impossibles à expliquer », précise l’expert d’EY . À titre d’exemple, les solutions d’aide au diagnostic et à la définition d’un plan de traitement personnalisé, basées sur les algorithmes de réseaux de neurones, fournissent au médecin une proposition sans que le processus de décision soit formalisable . Si plus de la moitié des sondés estiment que l’IA facilite la gestion des flux, 76 % sont convaincus qu’elle va inéluctablement nécessiter de repenser l’organisation du travail et la répartition des tâches . « Anticiper la mutation des métiers et la montée en compétences requises s’impose », explique Bertrand Dupont, directeur général du CHRU de Nancy .
Un frein : l’insuffisance
de compétences
Les CHU sont partagés sur le pilotage du déploiement de l’IA : 36 % souhaitent le confier à la direction de la stratégie, 29 % à la direction de la recherche et 19 % à une nouvelle direction dédiée . Reste que les principaux freins sont l’insuffisance de compétences ou d’expertises spécifiques pour 67 % des répondants, la complexité du développement d’un projet IA pour 57 %, et l’organisation en silos qui rend difficile le travail en mode transverse pour 57 % . l
Thomas Petit-Bourg, MD Report
Loïc Chabanier, associé EY en charge de la santé : « L’intelligence artificielle se révèle prometteuse dans le secteur hospitalier français, avec un large champ d’application : la recherche clinique, l’aide au diagnostic, la simplification du parcours patient, la prédic- tion des flux et l’optimisation des coûts. »
L’enquête a été réalisée fin 2019 auprès des directeurs généraux et des présidents des commissions médicales d’établissement des 32 centres hospitaliers universitaires (CHU) . « Ce baromètre vise à connaître le degré de maturité de l’IA dans ces hôpitaux, l’état d’avancement et les ressources déployées », explique Loïc Chabanier, associé EY en charge de la santé . 81 % des répondants considèrent que l’IA est un sujet très important pour les CHU . Les trois quarts identifient l’IA comme une priorité stratégique . Et 67 % d’entre eux ont déjà mis en œuvre des dispositifs d’IA .
Six principaux domaines d’application
« Les CHU français manifestent la volonté de jouer un rôle actif dans le développement de l’IA, sans forcément attendre que les éditeurs développent des solutions », observe Loïc Chabanier . Selon lui, le principal atout de l’IA est sa capacité à corréler des facteurs
cliniques, biologiques ou métrologiques pour un volume important de données . Six domaines sont plébiscités : la recherche via l’analyse de publication et de grands volumes de données, le suivi et l’appui aux pratiques médicales et soignantes, le pilotage des activités (codage, visualisation des données), la personnalisation du parcours du patient ainsi que la performance des processus administratifs et logistiques .
Les CHU multiplient les projets de recherche sur l’aide au diagnostic qui mobilise l’analyse d’images, la corrélation de données médicales et la mise en œuvre d’arbres de décision complexes . Ils utilisent l’IA comme appui à la médecine de précision, grâce à la mobilisation d’équipements intelligents au cours de la prise en charge et du traitement, tels que des robots opératoires, des assistants virtuels et des équipements connectés . Cependant, « la mise en place de l’IA à grande échelle au sein des organisations génère encore des réticences », poursuit Loïc Chabanier . 62 % des répondants craignent que son usage n’entraîne une déshumanisation du travail et la perte de liens sociaux .
De fortes craintes
et des interrogations
Pour 81 % des sondés dans les CHU français, la libération de temps sur les fonctions support pour se consacrer à des tâches à plus forte valeur ajoutée constitue le bénéfice principal de l’IA . Seulement 57 % estiment qu’elle pourra réduire les risques d’erreurs . Par ailleurs, l’IA suscite une certaine méfiance chez
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#23 • mars 2020
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