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Environnement bancaire et monétaire
L’Etat « développeur » tel qu’il a fonctionné avant la période d’ajustement structurel s’inspirait du
corpus théorique et pratique fourni par l’économie du développement : pessimisme à l’égard
d’une croissance fondée sur l’exploitation des matières premières, et préférence pour
l’industrialisation et la diversification des exportations ; importance d’un haut niveau d’épargne et
d’investissement, et nécessité d’adopter des politiques de mobilisation des ressources ; accent
particulier mis sur l’éducation et la formation ; reconnaissance du rôle coordinateur de l’Etat ;
méfiance à l’égard des imperfections de marché, qui justifient des interventions correctrices de
l’Etat.
Le développement étant vu comme une trajectoire, les Etats dans les pays en développement
devaient donner une impulsion spéciale. C’est le big push (Rosenstein-Rodan, 1943), "l’effort
critique minimum" (Lebenstein, 1963). L’idée était de sortir les pays de la "trappe d’équilibre à
faible croissance" dans laquelle l’histoire les avait enfermés et de les conduire vers un équilibre
plus élevé pour "décoller" (Rowstow, 1960).
Mais le plaidoyer pour plus d’Etat ne doit pas créer l’illusion que l’on doit chercher à reprendre le
cours des choses là où elles ont été laissées. La réhabilitation de l’Etat comme acteur du
développement doit tenir compte des expériences accumulées et des changements profonds de
l’environnement global.
La globalisation économique et financière a sévèrement, sinon totalement, restreint les options
disponibles pour les Etats. La logique conseille donc aux gouvernements d’ouvrir leur pays au
commerce et de s’ajuster aux exigences de la globalisation. La recette est réputée universelle et
les pays en développement ne peuvent adopter des politiques particulières. Tous les acteurs
impliqués dans le développement doivent intégrer la nouvelle donne globale dans leurs analyses.
c. Croissance et équité
Pendant longtemps, les économistes du développement manifestaient un certain pessimisme
quant aux relations entre la croissance économique et l’équité sociale (justice sociale, égalité dans
la répartition des revenus,…). Ils ont le plus souvent défendu l’idée que l’inégalité sociale favorise
l’investissement, les riches ayant une propension à épargner plus forte que les pauvres. La
croissance et l’équité étaient vues comme deux phénomènes antinomiques, soit les pôles opposés
d’un arbitrage permanent, soit comme des étapes successives dans la trajectoire de
développement.
Les travaux théoriques et empiriques récents suggèrent qu’aucune de ces deux conceptions n’est
toujours vraie. Dans certaines expériences de développement plus récentes, l’équité a
incontestablement encouragé la croissance. Alors que le néolibéralisme abandonne au marché les
questions de distribution, vouant toute politique sociale à créer des "distorsions" ou à effrayer les
investisseurs, la réflexion sur le développement doit plus que jamais s’intéresser aux questions
d’équité et de genre (égalité homme/femme). La politique sociale ne traite pas seulement du
contenu normatif du développement, elle fournit aussi des instruments cruciaux de
développement.
d. Développement et durabilité environnementale
L’une des préoccupations les plus récentes que doit désormais intégrer la nouvelle économie du
développement est la durabilité environnementale du processus de développement. Cela passera
certainement par un dialogue avec l’économie des ressources naturelles. Mais l’économie de
l’environnement a plus étudié les questions de transmission de l’environnement entre les
générations que celles de répartition entre les individus d’une même génération.
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