Page 34 - Les Kamasutra
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dans la conscience du plaisir, car l’homme pense :
            “Cette femme m’est unie”, et la femme pense : “Je suis unie à cet
          homme.”
            On peut observer : Si les manières d’opérer sont différentes chez
          l’homme et chez la femme, pourquoi n’y aurait-il pas une différence
          dans le plaisir même qu’ils ressentent et qui est le résultat de ces
          manières d’opérer ?
            Mais cette objection est sans fondement : car l’agent et le patient
          étant des personnes de différente sorte, il y a là une raison pour qu’ils
          opèrent de différentes manières ; mais il n’y a pas de raison pour
          qu’il y ait une différence quelconque dans le plaisir qu’ils ressentent,
          parce que ce Plaisir dérive naturellement pour tous deux de l’acte
          qu’ils accomplissent.
            Là.   dessus   encore,   quelques-uns   pourront   dire :   Lorsque
          différentes personnes sont occupées au même ouvrage, nous voyons
          qu’elles concourent au même but ou objet ; tandis qu’au contraire,
          dans l’union de l’homme et de la femme, chacun deux poursuit son
          but séparément, ce qui est illogique. Mais l’observation n’est pas
          juste ; car nous voyons quelquefois deux choses faites en même
          temps,   comme   dans   le   combat   de   béliers,   où   les   deux   béliers
          reçoivent, chacun en même temps, le choc sur leur tête.

            De même, lorsqu’on lance l’une contre l’autre deux boules à
          jouer, et encore dans un combat ou lutte d’athlètes. Si l’on observe
          que, dans ce cas, les éléments employés sont de même sorte, on
          répondra que, dans le cas de l’homme et de la femme, la nature des
          deux personnes est aussi la même. Et comme la différence dans leur
          manière   d’opérer   provient   seulement   de   leur   différence   de
          conformation, il s’ensuit que les hommes éprouvent la même sorte de
          plaisir que les femmes.
            Il y a aussi là-dessus un verset dont voici le texte : “Les hommes
          et les femmes étant de même nature, trouvent la même sorte de
          plaisir ; et conséquemment un homme doit épouser une femme qui
          puisse l’aimer toujours dans la suite.” Étant prouvé que le plaisir des
          hommes et des femmes est de même sorte, il s’ensuit que, par rapport
          au temps, il y a neuf sortes de commerce sexuel, de même qu’il y en



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