Page 26 - Lux in Nocte 13
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D’un train à l’autre
Vivianne Melh
Gare Saint Lazare – la salle des Pas Perdus
Voix n°1
Une gare, un départ, un trajet maintenant habituel. Je rentre chez mes parents ce
week-end comme tant d’autres. Le train me sert de séparateur de temps et d’espace.
Ici Paris et sa vie trépidante et là-bas le calme de la campagne. Le train est bondé
comme tous les vendredis soir. Le train d’été que j’appelle le train des célibataires !
Tous ces hommes, costume cravate et attaché-case viennent aussi faire la transition
entre Paris et la semaine de travail pour un repos temporaire, escale ensoleillée,
amicale ou familiale au bord de l’eau. Comme eux, je viens goûter un parfum
différent, un semblant de vacances. Ce train bondé, aux voyageurs affairés, ceux
encombrés de valises qui préparent leur transhumance et les autres légers, assis à
même le sol quand la place manque. C’est souvent mon lot, à force de quitter le
bureau au dernier moment et ne pas prévoir l’incident qui ralentit le métro. Je cours,
me faufile entre les passagers, un peu sans gêne, obnubilée par l’accès au quai, par le
guichet dont la file d’attente sera la plus rapide. Combien de fois n’ai-je pas senti la
chaleur de l’adrénaline envahir ma gorge, la peur se saisir de ma réflexion,
l’étouffement bloquer ma respiration. Alors jambes flageolantes, prête à renoncer, je
continue ma course le corps exsangue. Et enfin, debout ou assise, siège ou couloir,
j’ouvre un livre et commence mon voyage. De temps en temps à la faveur d’un
ralentissement, je lève les yeux de mon roman et me tourne vers le paysage qui s’offre
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