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Je ne peux exprimer que des résultats. Mes aphorismes ne sont pas vraiment des
aphorismes ; chacun d’eux est la conclusion de toute une page, le point final d’une petite
crise d’épilepsie. [...]
Je laisse tout tomber et je ne donne que la conclusion, comme au tribunal, où il n’y a, à la
fin, que le verdict : condamné à mort. Sans le déroulement de la pensée, simplement le
résultat. C’est ma façon de procéder, ma formule.
Avec Fritz J. Raddatz, 1986.
ASCÉTISME
Un esprit que je respecte infiniment, c’est Épicure. Qu’on pense simplement à son jardin.
Ses disciples ne mangeaient que du pain, ne buvaient que de l’eau, et conversaient sur le
bonheur ou Dieu sait quoi d’autre. Ou bien, qu’on se rappelle la vie que menait Socrate.
L’ascétisme dont ces hommes ont fait preuve et la fécondité, la variété des productions de
leur esprit ! Comparés à eux, nous devons bien avouer que nous ne sommes que des
schèmes, des espèces de spectres savants.
Avec Georg Caryat Focke, 1992.
AVENIR
S’il est un mot pour désigner l’avenir, ce mot est « enlisement ». L’homme est destiné à
s’enliser parce que tout destin exceptionnel implique une chute. Je suis de plus en plus
persuadé que l’homme finira — métaphysiquement, historiquement — par être un
fantôme, une ombre ; ou qu’il deviendra une sorte de retraité ou d’imbécile. On ne peut
le « sauver », parce que la voie qu’il a prise est nécessairement néfaste.
Avec Luis Jorge Jalfen, 1982.
BACH
Sans Bach, Dieu serait diminué. Sans Bach, Dieu serait un type de troisième ordre. Bach
est la seule chose qui vous donne l’impression que l’univers n’est pas raté. Tout y est
profond, réel, sans théâtre. On ne peut supporter Liszt après Bach. S’il y a un absolu, c’est
Bach. [...] Sans Bach, je serais un nihiliste absolu.
Avec Benjamin Ivry, 1989.
BECKETT
Il m’est très difficile de définir Beckett. Tout le monde se trompe en ce qui le concerne,
en particulier les Français. Tous se croyaient obligés de briller devant lui, or Beckett était
un homme très simple, qui ne s’attendait pas à ce qu’on lui lance de savoureux paradoxes.
Il fallait être très direct, surtout pas prétentieux... J’adorais chez Beckett cet air qu’il avait
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