Page 67 - Le grimoire de Catherine
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Il se laisserait bien tenter mais ne s’agissait -t-il pas d’un stratagème pour l’empêcher
d’aller plus loin en le détournant de son objectif initial, connaître la signification du
fameux signe repéré sur le tronc.
Ce dernier ne ressemblait à rien, pas à un hiéroglyphe, pas à un graffiti d’enfant
encore moins à un message d’amour.
Il devait véhiculer un signal cabalistique ! Peut-être était-il arrivé là, via un oiseau d’un
pays inconnu. Même s’il avait eu la pierre de Rosette en main ou une tablette argileuse
sumérienne, il lui aurait été impossible de lui donner un sens.
Ce fut alors qu’un chuchotement se fit entendre. Il émanait d’un grand chêne dont le
tronc avait été évidé soigneusement. Un animal en bois précieux y pointait son nez !
« -Penche-toi, encore, encore, regarde bien, tu me vois ?
Je suis Kim, le petit ours. J’habite dans cette cachette. C’est une hirondelle qui m’a
présenté à ce vieil arbre qui s’ennuyait et qui se lamentait tous les jours. Il se sentait si
inutile !
Depuis ce temps, il me protège de la pluie, du froid et moi je lui raconte la recette du
gâteau au miel. »
Décidément la nature lui faisait bien des cadeaux inattendus, il s’en trouva tout
bouleversé et essuya même une petite larme, lui qui se vantait toujours devant ses
amis d’être un guerrier inébranlable et même infaillible.
Il allait rebrousser chemin quand il distingua au loin une silhouette, un tronc d’arbre
enduit d’une peinture blanche lui faisait face.
« -Tu imagines ta promenade finie. Pas du tout ! Je suis là, tout au fond du bois, je me
présente Félix le fantôme. Es-tu sûr de bien me voir ? Mes yeux brillants ? Ma bouche
coquine ? Ma longue robe blanche ?
Si tu me distingues, c’est très bien, c’est que tu es encore un enfant. Seul un enfant
comme toi peut encore entrer dans l’étrangeté des choses »
Et brutalement tout bascula, la forme leva les bras, rejeta le drap qui la dissimulait
et un homme, un vrai, s’avança vers lui. Quelle frayeur !
« -Je suis Sylvestre, le bûcheron de cette forêt. J’y ai passé ma vie à couper, à cisailler
branches et racines de tous ces arbres si différents les uns des autres.
Si j’ai permis à certains de grandir, j’en ai fait souffrir d’autres. Je voudrais tant montrer
à tous que je ne suis pas le méchant qu’ils imaginent et les réunir lors d’un banquet. Ils
verraient que je ne suis pas qu’un prédateur, ainsi ce serait une belle occasion pour
qu’ils fassent connaissance, même qu’ils sont restés pour la plupart auprès de leur
souche maternelle.
Le signe que tu as vu sur le tronc de leur ancêtre, l’eucalyptus, c’est moi qui l’ai
réalisé et mis sur ton trajet habituel. En effet pour réaliser mon projet j’ai besoin d’une
aide mais pas du premier venu. Il faut que l’élu soit capable non seulement de se
servir de ses mains mais aussi de s’émerveiller. Il devra savoir écouter, ne pas
s’effrayer face à l’inconnu. Il sera le réceptacle de ce qu’i y a de meilleur en chacun.
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