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DOSSIER Santé et nouvelles technologies
Une utilisation à travers diverses du sang et des maladies. Des exemples notoires sont fournir un médicament, réparer ou changer des particules qui partie intégrante, ce qui montre le risque, dans un
étaient, auparavant, inaccessibles dans le corps humain », pré-
les suivants : le « respirocyte », un nanorobot capable
premier temps, de dépendance mais également de
applications de passer par le système respiratoire pour distribuer cise Arnaud Touati. Des chercheurs de l’université de dysfonctionnement du nanorobot qui pourrait être
de l’oxygène dans le sang en utilisant le glucose pré- Californie à San Diego (États-Unis) ont réussi à en- fatal au patient.
La neurochirurgie est une application clinique extrê- sent dans son environnement pour se propulser. Par voyer un nanorobot pour délivrer des médicaments à Selon le rapport d’information du Sénat n°517(2015-
mement prometteuse pour les nanorobots, là où les ailleurs, il existe aussi les « microbivores », des agents une souris et le résultat s’est avéré positif : les cellules 2016) de Bruno Sido, « Dans un tel contexte, les questions
méthodes chirurgicales traditionnelles ont montré dits « phagocytes » comportant des sites de fixation cancéreuses humaines ont été largement réduites. d’expropriation de son propre corps, des limites de la vie privée,
leurs limites, et notamment pour des opérations liées à leur surface permettant de capturer des bactéries Il n’existe cependant pas de test sur des humains des contours de la dignité humaine, de l’intégrité physique, de
à des blessures de la moelle épinière ou des lésions comme E. Coli. Des études rapportent que leur effi- jusqu’à aujourd’hui. Cependant, ceux réalisés sur des l’identité devront être revisitées. En retour, surgira la question de
nerveuses. « Plusieurs études se lancent actuellement dans la cacité est 80 fois supérieure aux antibiotiques dans la souris ont déjà prouvé l’efficacité sur les traitements la réversibilité de ces évolutions au nom de la préservation de
reconnexion nerveuse opérée par des nanorobots, qui permettraient lutte contre les infections, ce qui en fait un domaine ciblés afin de réduire les effets secondaires et améliorer l’individu et de sa dignité. »
de manipuler les neurones individuellement et de « rebrancher » extrêmement prometteur face à l’antibiorésistance. En les résultats cliniques. Selon Raphaël Dubois, attaché
des axones (connexions neuronales) qui ont été endommagés. Des odontologie : à peu près toutes les opérations dentaires adjoint pour la Science et la Technologie au consulat Les questions d’expropriation
avancées extraordinaires ont été remarquées dans la lutte contre les plus communes pourraient s’effectuer avec des général de France à Los Angeles : « La mise au point de de son propre corps, des limites
les séquelles de la rupture d’anévrisme, un accident cérébral extrê- nanorobots. Par exemple, le nettoyage et le blanchi- nanorobots à ADN repose sur un procédé appelé Origami ADN.» de la vie privée, des contours
mement courant qui laisse des dommages irréversibles, entraînant ment des dents mais aussi l’anesthésie. Cette technique, consistant à réaliser des formes de la dignité humaine,
des taux de survie à trente jours inférieurs à 50% », explique arbitraires à partir de morceaux d’ADN, est basée sur de l’intégrité physique, de l’identité
Alice Martin. Les nanorobots pourraient également Des thérapies de plus en plus les propriétés et la complémentarité des bases azotées
apporter de nouvelles solutions aux chirurgies des can- constituant la molécule d’ADN. Elle a été développée devront être revisitées.
cers. L’engin est injecté au moment de l’opération et ciblées par Paul Rothemund, du CIT, en 2006. En effet, les
se fixe sur les tissus cancéreux ou métastasés, puis il liaisons hydrogène qui existent entre les bases azotées Des questions de responsabilités
émet un rayonnement électromagnétique permettant À l’avenir, nous pourrions bénéficier de thérapies bien confèrent automatiquement à l’ADN sa structure tri-
au chirurgien de localiser avec précision la zone à opé- ciblées grâce aux nanorobots. « L’objectif de certains or- dimensionnelle en double hélice, ce qui va permettre éthique et légale
rer. Les études in vivo en cours dans les laboratoires de ganismes créant des nanorobots est de trouver et anéantir les au nanorobot de couper l’apport en nutriments et en
recherche couvrent un large panel d’applications du cellules cancéreuses. Une autre possibilité serait de détecter les oxygène aux tumeurs et induire la mort cellulaire par En prenant en considération l’autonomie grandissante
domaine clinique. Ces domaines concernent l’hémato- produits chimiques et toxiques dans une zone précise et mesu- le mécanisme d’apoptose et ainsi détruire la tumeur. des robots, la question qui se pose est : qui exactement
logie : leur taille ouvre de nouveaux horizons à l’étude rer leur concentration. Le but de la thérapie nanociblée est de devrait s’engager en termes de responsabilité morale
et/ou légale du comportement des robots ?
La sécurité, un enjeu de taille
Selon Valère Ndior, professeur de droit public à l’uni-
Il existe plusieurs obstacles au développement rapide versité de Bretagne-Occidentale, « Il semble exister une
de ces techniques. En effet, la phase R&D pourrait responsabilité commune ou partagée entre le concepteur, l’ingé-
non seulement coûter extrêmement cher et soulever nieur, le programmeur, le fabricant, l’investisseur, le vendeur et
la question de la sécurité du patient. La méconnais- l’utilisateur du robot. Aucun de ces acteurs, en effet, ne peut être
sance de la nanotechnologie pourrait conduire à un désigné comme la source unique d’un acte. Cette approche, cepen-
encadrement et une réglementation très stricte. La ré- dant, a pour effet de diluer la notion de responsabilité : si tous
glementation du secteur de la robotique est confrontée ces acteurs ont une part de la responsabilité totale, aucun d’eux
à quatre difficultés : n’est entièrement responsable. Surmonter l’effet potentiellement
• rester en phase avec l’évolution rapide des techno- paralysant de la difficulté à endosser ou assigner la responsabilité
logies ; représente donc un enjeu majeur pour l’éthique de la robotique.»
• trouver un équilibre entre stimuler ou, tout au moins, Les nanorobots pourraient grandement révolutionner
ne pas freiner l’innovation et protéger les valeurs et la médecine de demain. La recherche et le dévelop-
droits humains fondamentaux ; pement tentent de trouver des traitements efficaces,
• savoir quand affirmer les normes sociales existantes notamment contre les maladies graves comme les
ou les pousser à évoluer dans de nouvelles directions ; cancers, tumeurs… Néanmoins, l’émergence de ces
• et mettre en balance l’efficacité et la légitimité de nanorobots pourrait résoudre de nombreux problèmes
la réglementation des technologies. La technologie actuels, surtout en termes d’accessibilité aux zones
ne peut plus toujours être considérée comme sensibles du corps humain.
Pour injecter un nanorobot dans le corps, il suffit de l’ingérer. extérieure au corps biologique : elle en devient une Darine Habchi
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