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PATHOLOGIIES
dominante ou récessive selon les cas (formes fami- liales), voire sporadique (cas survenant sans antécé- dents familiaux) et à pénétrance diverse et donc plus ou moins sévère selon les cas. Le syndrome touche autant les filles que les garçons. Et grâce à une étude internationale portant sur 11 enfants atteints dans 7 pays différents, on connaît même les responsables de cette pathologie : des mutations de trois gènes impliqués dans la formation du cheveu, les gènes PADI3, TGM3 et TCHH.
DIAGNOSTIC FACILE
Le diagnostic est très facile à poser, encore
faut-il connaître ce syndrome. En effet, il se ma- nifeste dès l’enfance (entre 3 mois et 12 ans) par
des cheveux « fous » car ingérables, rêches et secs, dressés et qui poussent dans tous les sens, un peu comme lors du phénomène de l’électricité statique. Pour autant, le volume de la chevelure est normal. Et rien n’y fait, ni la brosse ni le peigne ni toute autre technique de salon de coiffure, de shampoings ou soins doux ne permettent une amélioration vraiment notable.
CHEVEUX BLONDS SURTOUT
Curieusement, cette pathologie ne touche pas les poils et ne concerne que les cheveux blonds, pla- tine ou couleur paille. Le cheveu apparaît sec, bril- lant, frisé parfois, bouclé, voire carrément crépu. La situation semble s’améliorer à la puberté et les che- veux se laissent « apprivoiser ». Pour autant, certains peuvent garder des cheveux difficilement coiffables par la suite. Tout dépend de la pénétrance de la mala- die, très variable d’une personne à une autre. Ce syn- drome peut s’accompagner d’autres symptômes, ocu- laires (atteinte de la rétine, cataracte), d’anomalies des doigts ou des dents (anomalie de l’émail).
TRIANGULAIRE
Les mutations des gènes qui prévalent à la formation du cheveu ont une conséquence directe : le cheveu n’a plus une section ronde mais une section plutôt triangulaire, ou en forme de haricot, comme rainuré sur toute la lon- gueur par un sillon, un canal ou un aplatissement. C’est très facile à mettre en évidence au microscope électro- nique à balayage (quand on en dispose !). D’une façon générale, pour que le syndrome soit facilement identi- fiable, la moitié des cheveux doit être touchée. Quant à l’aspect rêche du cheveu, il serait dû à un dysfonctionne- ment de sa kératinisation.
DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL
Plusieurs pathologies peuvent s’accompagner d’anomalies capillaires assez semblables au syndrome des cheveux incoiffables. En général, elles comportent certains
signes associés ou une autre particularité du cheveu qui permettent de bien les différencier. En cas de doute, l’examen des cheveux par microscope permet de faire le diagnostic. Voici des exemples de pathologies qui touchent aussi les cheveux :
• Certains cas de fente labiale (bec de lièvre).
• Dysplasies ectodermiques tricho-odonto-onychiales
familiales.
• « Loose anagen syndrome », où les cheveux s’arrachent
facilement.
• Syndrome de Rapp-Hodgkin (qui n’a rien à voir avec la
maladie de Hodgkin) et qui associe des anomalies des cheveux, des ongles, des dents et de la bouche.
AUTRES APPELLATIONS
• Spun-glass hair (« cheveux en verre filé »), qui évoque le filament de verre lorsqu’il est soufflé par le souffleur de verre
• Syndrome « Pili trianguli et canaliculi » (cheveux triangulaires et canalaires)
• « Uncombable hair syndrome » (cheveux « ingérables »)
• « Syndrome de Struwwelpeter », autrement dit le
syndrome de « Pierre l’ébouriffé », héros d’un livre d’histoires pour enfants publié en 1845. Il est probable que l’écrivain de ce recueil se soit inspiré du cas d’un enfant porteur du syndrome à l’époque. Et c’est ce personnage qui aurait d’ailleurs servi à Tim Burton pour son film « Edward aux mains d’argent », avec Johnny Depp.
Dr Daniel Gloaguen
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